Ville de London

Ville de London

juin 12, 2015

12 juin 2015

Nous avons reçu une plainte alléguant que le Comité des priorités stratégiques et des politiques de London avait tenu illégalement une réunion à huis clos pour discuter de propositions avancées par des promoteurs en vue d’acquérir et de réaménager des terrains que possédait la Ville. L’Ombudsman a conclu que les discussions relevaient des exceptions de l’acquisition ou de la disposition d’un bien-fonds et du secret professionnel de l’avocat.

À la suite de la publication de ce rapport, la Ville de London a informé notre Bureau que la conseillère Tanya Park n’assistait pas à la réunion à huis clos du 2 mars 2015. Le rapport indiquait que tous les membres du Conseil étaient alors présents. La Ville n’a pas rectifié ce renseignement quand notre Bureau a passé en revue l’ébauche du rapport avec elle, au téléphone, avant sa publication. À des fins d'information, la Ville a soumis la Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletlettre ci-jointe (en anglais).

Enquête visant à déterminer si le Comité des priorités stratégiques et des politiques de la Ville de London a tenu une réunion illégale le 2 mars 2015
 
André Marin
Ombudsman de l’Ontario

Juin 2015

 

Plainte

1       Le 3 mars 2015, mon Bureau a reçu une plainte à propos d’une réunion à huis clos que le Comité des priorités stratégiques et des politiques [« le Comité »] avait tenue le 2 mars 2015, pour la Ville de London.
 
2       La réunion s’était tenue à huis clos en vertu de l’exception de « l’acquisition ou la disposition projetée ou en cours d’un bien-fonds » énoncée à l’alinéa 239 (2) c) de la Loi de 2001 sur les municipalités, et dans le cadre de l’exception des « conseils qui sont protégés par le secret professionnel de l’avocat », à l’alinéa 239 (2) f).
 
3       D’après le plaignant, les discussions à huis clos du Comité sur des propositions de réaménagement d’un hôpital désaffecté auraient dû se tenir en public.
 
 

Compétence de l’Ombudsman

4       En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités [la Loi], toutes les réunions d’un conseil municipal, d’un conseil local, et d’un comité de l’un ou de l’autre doivent se tenir en public, sous réserve des exceptions prescrites.
 
5       Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité s’est dûment retirée à huis clos. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur ou recourir aux services de l’Ombudsman de l’Ontario. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut dans les municipalités qui n’ont pas désigné leur propre enquêteur.
 
6       Mon Bureau est chargé d’enquêter sur les réunions à huis clos dans la Ville de London.
 
7       Lorsque nous enquêtons sur les plaintes à propos de réunions à huis clos, nous déterminons si les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi et le Règlement municipal de procédure ont été respectées.
 
 

Élections municipales de 2014

8       Des élections municipales ont eu lieu le 27 octobre 2014. Seuls quatre des membres du précédent Conseil ont été réélus. Le maire et 14 conseillers ont été assermentés le 1er décembre 2014.
 
 

Plaintes précédentes

9       Depuis 2011, notre Bureau a reçu plus de 80 plaintes à propos de la Ville de London[1], notamment à propos de réunions à huis clos du Comité des priorités stratégiques et des politiques de London.
 
10    Le 31 janvier 2014, le Comité a discuté de questions de « relations de travail » au sujet des pompiers de la Ville, lors d’une séance à huis clos. Je n’ai pas trouvé de preuve pouvant mener à conclure que les membres du Conseil avaient pris des décisions ou effectué des votes contrairement à ce qui est autorisé à huis clos.
 
11    Le 7 février 2014, le Comité a tenu une séance à huis clos pour discuter de « l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds ». J’ai conclu que la réunion s’était dûment tenue à huis clos, mais j’ai constaté que le compte rendu de la séance était incomplet et j’ai recommandé que le Conseil conserve des dossiers complets et détaillés des discussions à huis clos, et qu’il envisage de faire un enregistrement audio ou vidéo de ses huis clos.
 
 

Processus d’enquête

12    Après avoir effectué un examen préliminaire, mon Bureau a avisé la Ville de London que nous enquêterions sur cette plainte, le 22 mai 2015.
 
13    L’Équipe d’application de la loi sur les réunions publiques (OMLET) de mon Bureau a étudié les extraits pertinents du Règlement de procédure de la Ville et de la Loi, ainsi que les ordres du jour, les procès-verbaux et les rapports de comité relatifs, de même que les pièces justificatives à propos de la réunion du 2 mars. Elle a parlé avec la secrétaire de la Ville, le directeur général de la planification et l’urbaniste.
 
14    Mon Bureau a obtenu une pleine collaboration au cours de cette affaire.
 
 

Contexte : Le Comité

15    Le paragraphe 238 (1) définit ainsi un « comité » : « comité ou sous-comité consultatif ou autre, ou une entité similaire, dont au moins 50 pour cent des membres sont également membres d’un ou de plusieurs conseils municipaux ou conseils locaux ».
 
16    Le Comité des priorités stratégiques et des politiques est un comité permanent qui comprend le maire et l’ensemble des 14 membres du Conseil. Par conséquent, c’est un comité au regard des dispositions des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités.
 
17    D’après le Règlement de procédure de London (no A-45), le mandat de ce Comité comprend la planification stratégique, les stratégies économiques, les initiatives et les budgets d’immobilisation.
 
 

Contexte : Le terrain du Old Victoria Hospital

18    La Ville de London prépare actuellement le réaménagement d’un terrain de cinq hectares, appelé le terrain du Old Victoria Hospital, qu’elle avait acheté en 1866 pour y édifier son tout premier hôpital[2].
 
19    La Ville a entrepris un processus en deux étapes pour vendre ce terrain à un promoteur. La première étape consiste à obtenir des propositions d’achat par le biais d’un processus de demandes de manifestation d’intérêt[3]. Ces demandes de manifestation d’intérêt sont des propositions d’achat et d’aménagement du terrain, avec des renseignements indiquant en quoi les promoteurs sont qualifiés pour ce projet. Une fois que les candidats qualifiés auront été identifiés, la seconde étape consistera à obtenir plus de renseignements par le biais d’un processus de demandes de propositions (DP). Quand un promoteur aura été sélectionné, le terrain sera vendu et réaménagé conformément à la proposition choisie.
 
 

Réunion du Comité le 2 mars

20    Le Comité s’est réuni le 2 mars 2015. Il a voté pour se retirer à huis clos à 18 h 19, afin de discuter d’un sujet relevant du secret professionnel de l’avocat et de questions ayant trait à l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds. La séance publique a repris à 19 h 45, puis il y a eu une pause et la séance à huis clos a repris de 21 h 42 à 22 h 59.  
 
21    Tous les membres du Comité étaient présents durant le huis clos, de même que : l’adjoint au secrétaire municipal; le directeur municipal; trois employés du bureau de l’avocat de la Ville; le directeur général des services d’aménagement et de conformité et chef des services du bâtiment; le directeur de division des services immobiliers; le directeur général des services internes et trésorier de la Ville et directeur financier; le directeur général de la planification et de l'urbanisme; et quatre autres membres du service de planification.
 
22    Durant la séance à huis clos, le Comité a examiné des conseils juridiques confidentiels concernant la désaffectation du terrain du Old Victoria Hospital (aussi appelé South Street Campus). La teneur de la discussion a été expurgée du rapport du Comité fourni à mon Bureau, en vertu du secret professionnel de l’avocat. Le secret est maintenu conformément au paragraphe 19 (5) de la Loi sur l’ombudsman :

La personne qui fournit des renseignements, répond à des questions ou produit des documents ou objets jouit des mêmes immunités à cet égard qu’un témoin devant un tribunal.


23     Le Comité a aussi entendu l’urbaniste de la Ville, qui a examiné les manifestations d’intérêt provenant de promoteurs qui aimeraient acheter le terrain et le réaménager. Il a dit au Comité comment le personnel avait évalué chacune des manifestations d’intérêt et a expliqué les recommandations faites par ce dernier pour passer à l’étape suivante, celle des demandes de propositions pour la disposition du bien-fonds.

24     Le Comité a reçu des renseignements généraux pour situer le projet dans le contexte de l’examen des manifestations d’intérêt. Ces renseignements lui ont été fournis dans un document qui avait déjà été rendu public. Il n’a pas été discuté lors de la réunion.
 
 

Analyse

Applicabilité de l’exception du « secret professionnel de l’avocat »

25    Mon Bureau a cherché à déterminer si l’exception des « conseils qui sont protégés par le secret professionnel de l’avocat, y compris les communications nécessaires à cette fin », à l’alinéa 239 (2) f) de la Loi, s’appliquait aux discussions tenues à huis clos.
 
26    Cette exception ne peut être invoquée que si des conseils donnés par un avocat, ou des communications connexes, seront réellement examinés par le Conseil. Les communications ne peuvent être protégées par le secret professionnel de l’avocat que si : a) elles ont lieu entre un client et son avocat, l’avocat agissant à titre professionnel; b) elles sont faites dans le but de solliciter ou de recevoir des conseils juridiques; et c) elles sont censées demeurer confidentielles[4].
 
27    D’après le rapport du Comité et la secrétaire, le Comité a discuté de conseils juridiques donnés par l’avocat de la Municipalité au sujet du processus de désaffectation du terrain du Old Victoria Hospital. Par conséquent, les discussions cadraient avec l’exception énoncée à l’alinéa 239 (2) f).
 
 

Applicabilité de l’exception de « l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds »

28     Mon Bureau a aussi cherché à déterminer si les discussions cadraient avec l’exception énoncée à l’alinéa 239 (2) c) de la Loi, « acquisition ou disposition d’un bien-fonds par la municipalité ou le conseil local ».
 
29     Comme je l’ai expliqué dans mon examen d’une réunion à huis clos tenue par le Conseil de la Ville d’Oshawa en mars 2013, l’exception pour les discussions concernant l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds est discrétionnaire. Une étude de la jurisprudence pertinente montre que l’objectif premier de cette exception est de protéger la position d’une municipalité lors de négociations immobilières[5].

30     Dans l’ordonnance MO-3073, le Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée a conclu que la Niagara District Airport Commission était en droit de tenir une réunion en vertu de l’exception de « l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds » pour étudier les demandes reçues dans un processus de DP, pour louer à bail des terrains municipaux.

31     La Cour suprême de justice de l’Ontario a conclu qu’il n’était pas réaliste d’attendre des membres d’un conseil municipal qu’ils scrutent de près leurs discussions à huis clos sur l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds, pour en exclure toute référence à d’autres options envisagées, ou des renseignements historiques ou contextuels[6].

32     La discussion du Comité en vertu de cette exception s’est limitée à l'examen fait par l’urbaniste de la Ville au sujet des évaluations des manifestations d’intérêt provenant de promoteurs qui espéraient réaménager le terrain du Old Victoria Hospital.

33     En plus des documents qui lui ont été remis au sujet des évaluations des manifestations d’intérêt effectuées par le personnel, le Comité a obtenu des renseignements contextuels sur le projet. Ces renseignements contextuels n’ont pas fait l’objet de discussions durant la réunion. L’urbaniste de la Ville nous a expliqué que, comme beaucoup de membres du Comité étaient des conseillers nouvellement élus, les renseignements avaient été fournis à titre d’information et de contexte pour les manifestations d’intérêt.

34     L’urbaniste de la Ville a expliqué qu’il était essentiel de tenir les discussions du 2 mars à huis clos pour protéger la position de négociation de la Ville dans le cadre des négociations entourant la vente du terrain.
 
35     Par conséquent, les discussions à huis clos cadraient avec l’exception de « l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds » énoncée dans la Loi.
 
 

Opinion

36     Notre enquête a conclu que la réunion à huis clos du 2 mars du Comité des priorités stratégiques et des politiques de London n’avait pas enfreint les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités.
 
 

Rapport

37    Le personnel d’OMLET a parlé avec le maire, la secrétaire, l’urbaniste de la Ville et un avocat de la Ville le 8 juin 2015, pour leur donner un aperçu de ces conclusions et pour offrir à la Municipalité la possibilité de les commenter. Leurs commentaires ont été pris en considération dans la préparation de ce rapport.
 
38    Mon rapport devrait être communiqué au Conseil et mis à la disposition du public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion du Conseil.

 
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André Marin
Ombudsman de l’Ontario



[1] Voir p. ex. « Enquête visant à déterminer si la Ville de London a tenu indûment une réunion à huis clos au restaurant Harmony Grand Buffet » (août 2012), en ligne; Rapport : « En arrière-salle » (octobre 2013), en ligne; Rapport : « Tour de table » (septembre 2014), en ligne.
[2] City of London, Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletOld Victoria Hospital Lands, Secondary Plan (3 juin 2013), en ligne.
[3] « Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletCity seeks developers for Old Victoria Hospital Lands » (22 octobre 2014), en ligne.
[4] Solosky c. La Reine, [1980] 1 RCS 821, p. 837.
[5] Voir Report of the Provincial/Municipal Working Committee on Open Meetings and Access to Information, Toronto : The Committee, juillet 1984; S. Makush & J. Jackson, Freedom of Information in Local Government in Ontario, Toronto: Commission on Freedom of Information and Individual Privacy, 1979, citée dans l’ordonnance finale MO-2468-F, Re: City of Toronto, [2009] O.I.P.C. No. 171.
[6] St. Catharines (City) v. Ontario (Information and Privacy Commissioner), [2011] O.J. No. 1320, 2011 ONSC 2346, paragraphe 42.