Ville de Bracebridge

Ville de Bracebridge

mars 18, 2015

18 mars 2015

L’Ombudsman a conclu que le Conseil de la Ville de Bracebridge n’avait pas enfreint la Loi sur les municipalités en tenant une partie de ses réunions du 9 décembre et du 17 décembre à huis clos, en vertu de l’exception des « renseignements privés ».

Enquête visant à déterminer si le Conseil de la Ville de Bracebridge a tenu des réunions à huis clos illégales les 9 et 17 décembre 2014

André Marin
Ombudsman de l’Ontario

mars 2015

 

Plainte

1 Le 29 décembre 2014, mon Bureau a reçu une plainte à propos d’une séance à huis clos tenue par le Comité général de la Ville de Bracebridge, le 9 décembre 2014, et d’une séance à huis clos tenue par le Conseil municipal le 17 décembre 2014.

2 D’après cette plainte, les discussions lors de ces réunions ne relevaient pas des exceptions aux exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités (la Loi). Cette plainte alléguait notamment que le Conseil avait discuté de la composition générale du Comité consultatif sur l’accessibilité et que cette discussion n’avait rien de « privé » dans son fond.

 

Compétence de l’Ombudsman

3 En vertu de la Loi, toutes les réunions d’un conseil municipal, d’un conseil local, et d’un comité de l’un ou de l’autre doivent se tenir en public, sous réserve des exceptions prescrites.

4 Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité s’est dûment retirée à huis clos. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur ou recourir aux services de l’Ombudsman de l’Ontario. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut dans les municipalités qui n’ont pas désigné leur propre enquêteur.

5 L'Ombudsman est chargé d’enquêter sur les réunions à huis clos dans la Ville de Bracebridge.

6 Lorsque nous enquêtons sur les plaintes à propos de réunions à huis clos, nous déterminons si les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi et le Règlement municipal de procédure ont été respectées.
 


Processus d’enquête

7 L’Équipe d’application de la loi sur les réunions publiques (OMLET) de mon Bureau a examiné les extraits pertinents du Règlement de procédure de la Municipalité (Règlement 2013-55) et de la Loi, ainsi que la documentation des réunions du 9 décembre et du 17 décembre. L’Équipe a aussi communiqué avec le maire et le personnel municipal.

8 Mon Bureau a obtenu une pleine collaboration au cours de cet examen.

 

Procédures du Conseil

9 Le Règlement de procédure de la Ville stipule que les réunions ordinaires du Conseil se tiennent chaque troisième mercredi du mois, à 19 h. Le Comité général comprend tous les membres du Conseil et se réunit tous les deuxièmes mardis du mois à 9 h, la semaine avant la réunion du Conseil.

10 L’article 19 du Règlement décrit les procédures à suivre pour les réunions à huis clos et reflète l’article 239 de la Loi.

 

Réunion du Comité général le 9 décembre 2014

11 L’ordre du jour de la réunion du 9 décembre indiquait que le Comité général se retirerait à huis clos pour discuter d’un règlement de nominations, en vertu de l’exception des renseignements privés, ainsi que d’ajustements économiques conformément à l’exception des relations de travail. L’ensemble du Conseil était présent à la réunion.

12 En séance publique, le Comité général a adopté une résolution pour se retirer à huis clos en vertu de l’exception des renseignements privés énoncée à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi, afin d'examiner les nominations à des comités et d'étudier les ajustements de salaire conformément à l’exception des relations de travail. Seul le premier de ces deux points a fait l’objet de la plainte à notre Bureau.

13 La séance à huis clos a commencé à 11 h 18.

14 Alors qu’il était réuni à huis clos, le Comité général a examiné un rapport confidentiel du personnel à propos des nominations à divers comités pour le prochain mandat du Conseil. Le rapport signalait que des nominations devraient être décidées pour 18 comités et soulignait que plus de 40 demandes étaient parvenues de candidats à divers postes annoncés.

15 Dans ce rapport, le personnel proposait de conserver la structure existante de la plupart des comités, soit celle en vigueur durant le mandat précédent du Conseil, à l’exception du Comité consultatif sur l'accessibilité et de deux autres comités. Pour le Comité consultatif sur l’accessibilité, le rapport du personnel recommandait de réduire le nombre total des membres du Comité, et d'accroître le nombre de membres du Conseil siégeant au Comité, pour le faire passer d’un à deux.

16 Le rapport incluait une annexe (Annexe A) décrivant les anciens membres des comités, ainsi que les citoyens qui avaient posé leur candidature à des nominations, et il présentait des recommandations quant aux nominations aux comités.

17 L’Annexe B, jointe au document, regroupait les demandes de chaque candidat aux comités. Les demandes pour le Comité consultatif sur l’accessibilité donnaient aux candidats la possibilité d’indiquer s’ils étaient des personnes vivant avec un handicap, ou si les difficultés des personnes handicapées leur étaient familières.

18 À l’Annexe C, on trouvait le mandat actuel de chacun des comités.

19 Le procès-verbal de la séance à huis clos de cette réunion ne fournit que les résolutions énoncées à huis clos, sans donner de compte rendu des discussions tenues alors.

20 Lors des entrevues, nous avons été informés que, pour le Comité consultatif sur l’accessibilité, les discussions à huis clos avaient visé à déterminer si un membre du public qui était identifié devrait être ajouté à ce Comité. Bien que la réduction du nombre de membres du Comité ait été mentionnée dans le rapport du personnel, ceci n'a pas été discuté durant la séance à huis clos.

21 Le Comité général a enjoint au personnel de préparer un règlement visant à nommer certaines personnes et certains organismes aux différents comités, conseils ou postes de responsabilité municipaux répertoriés à l’Annexe A du rapport du personnel.

22 Le personnel a aussi reçu pour consigne de préparer des modifications au mandat des comités du Conseil et des candidats nommés pour 2014-2018, conformément à l’Annexe A. Une modification verbale a été apportée à la motion pour ajouter le nom de la personne identifiée dont il avait été question durant la réunion au sujet du Comité consultatif sur l’accessibilité, et donc pour faire passer de cinq à six personnes le nombre de citoyens siégeant au Comité.

23 Ces recommandations devaient être présentées à la réunion du Conseil le 17 décembre, en vue de leur approbation.

24 La séance à huis clos s’est terminée à 13 h 20.

25 En séance publique, le Comité général a répété les résolutions examinées à huis clos.

 

Réunion du Conseil le 17 décembre 2014

26 L’ordre du jour de la réunion du 17 décembre ne mentionne pas de séance à huis clos.

27 Durant les entrevues, nous avons été informés que le Conseil avait tout simplement l'intention d'approuver les recommandations du Comité général, et c’est pourquoi aucune séance à huis clos n’avait semblé nécessaire. Cependant, un membre du Conseil disposait de renseignements qu’il voulait partager, à propos d’une personne qui pouvait être identifiée, et le Conseil avait donc présenté une motion afin de se retirer à huis clos.

28 Le procès-verbal de la séance publique indique que le Conseil a adopté une motion pour examiner deux motions présentées par le Comité général séparément du reste des recommandations de ce Comité. Le Conseil a aussi adopté une motion pour examiner ces points à huis clos en vertu de l’exception des « renseignements privés ».

29 La séance à huis clos a commencé à 19 h 28 et tout le Conseil était présent.

30 Le procès-verbal de la séance à huis clos fait un compte rendu des motions examinées alors, mais n’indique rien sur la teneur des discussions.

31 Nous avons été avisés que les discussions à huis clos portaient sur une personne identifiée et son appartenance au Comité consultatif sur l’accessibilité. Les personnes présentes ont exprimé des opinions sur les qualifications personnelles de celle-ci et sur ses contributions précédentes à des comités du Conseil.

32 Pendant qu’il était réuni à huis clos, le Conseil a enjoint au personnel de modifier la motion énoncée dans le procès-verbal de la réunion du Comité général du 9 décembre 2014, pour radier le nom de cette personne du Comité consultatif sur l’accessibilité, réduisant ainsi le nombre de citoyens membres de ce Comité à cinq personnes.

33 La séance à huis clos s’est terminée à 20 h 36.

34 Quand le Conseil est sorti de sa séance à huis clos, il a adopté une résolution pour approuver les nominations du Conseil énoncées à l’Annexe A, exception faite de celles relatives au Comité consultatif sur l’accessibilité; pour abroger le règlement établissant le Conseil consultatif sur l’accessibilité; et pour enjoindre à la secrétaire de préparer des modifications au mandat des comités du Conseil et des candidats nommés pour 2014-2018, conformément à l’Annexe A du rapport du personnel.

35 Le Conseil a voté pour nommer certaines personnes au Comité consultatif sur l’accessibilité, conformément aux noms donnés à l’Annexe B du procès-verbal de la réunion du Conseil du 17 décembre. L’Annexe B n’avait pas été communiquée au public alors, mais elle l’a été sur demande le lendemain. Le vote a été remporté par 6 voix contre 3.

 

Analyse

36 Les discussions à huis clos du Comité général, le 9 décembre, ont porté sur les nominations aux comités en général, et plus particulièrement sur les capacités d’une personne identifiée à siéger au Comité consultatif sur l’accessibilité. Lors de la réunion du Conseil le 17 décembre, le Conseil a poursuivi les discussions à propos de cette personne identifiée. Lors des deux réunions, les discussions se sont déroulées à huis clos en vertu de l’alinéa 239 (2) b) de la Loi, « renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, y compris des employés de la municipalité ou du conseil local ».

37 Lorsqu’il examine la portée de cette exception, mon Bureau considère souvent les décisions du Bureau du commissaire à l’information et à la protection de la vie privée (CIPVP). Bien que non contraignantes pour mon Bureau, ces décisions peuvent s’avérer instructives. Dans l’ordonnance MO-1909[1], le CIPVP a conclu que la Ville n’était pas tenue de divulguer les noms des personnes qui avaient présenté leur candidature à divers comités, étant donné que la Ville avait dûment considéré ces noms lors d’une séance à huis clos. Le CIPVP a souligné que les discussions sur les candidatures à des postes de bénévoles étaient de nature personnelle.

38 Dans le cas des discussions qui ont eu lieu à huis clos le 9 décembre, le Comité général a examiné des dossiers de candidature qui comprenaient des renseignements sur les antécédents scolaires et professionnels des candidats. Pour le Comité consultatif sur l’accessibilité, les demandes de candidatures permettaient aux candidats de présenter leur expérience vécue relativement au handicap. Ces discussions révélaient des renseignements privés à propos des candidats et elles cadraient donc avec l’exception des « renseignements privés » énoncée à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi.

39 Le Bureau du Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée a aussi souligné que, pour être admis comme des « renseignements personnels » dans le cadre des exigences des réunions publiques, les renseignements doivent généralement porter sur un particulier à titre personnel, et non pas professionnel, officiel ou commercial[2]. Cependant, même si les renseignements ont trait à un particulier à titre professionnel, ils peuvent être considérés comme des renseignements personnels, s’ils révèlent un aspect de nature personnelle[3].

40 Les renseignements à propos d’une personne, à titre professionnel, seront considérés comme des renseignements privés s’ils sont reliés à l’examen de la conduite de cette personne[4], ou si la discussion comporte l’expression d’opinions à propos de cette personne[5].

41 Les discussions à propos d’une personne identifiée qui ont eu lieu à huis clos le 9 décembre et le 17 décembre portaient sur l’examen de la participation de cette personne à des comités du Conseil, de par le passé, et exprimaient des opinions quant à ses qualifications. Par conséquent, les discussions du 9 décembre et du 17 décembre relevaient aussi de l’exception des renseignements privés.

42 Bien que les discussions relèvent des exceptions citées, je constate que certaines hypothèses faites par le public auraient pu être évitées si plus de renseignements lui avaient été communiqués. Les parties du rapport du personnel qui ne concernaient pas les personnes identifiées, et qui n'étaient donc pas confidentielles – comme la partie sur la réduction des membres du Comité, de dix à cinq – auraient pu être communiquées au public lors de la réunion du 9 décembre. De même, le Conseil aurait pu rendre publics les renseignements donnés à l’Annexe B – notamment les noms des personnes nommées au Comité consultatif sur l’accessibilité – lors du vote à la réunion du 17 décembre, pour faire savoir clairement qui était nommé à ce Comité.

43 Enfin, je souligne que, même si l’objectif de l’alinéa 239 (2) b) est de protéger la vie privée de personnes qui peuvent être identifiées, le Conseil peut toujours librement demander aux candidats aux comités la permission de discuter publiquement de leur candidature, afin de renforcer la transparence du processus.

 

Questions de procédure

Comptes rendus des réunions

44 Le procès-verbal des réunions à huis clos du 9 décembre et du 17 décembre rend uniquement compte des résolutions examinées à huis clos, sans indiquer la teneur des discussions. Le personnel a informé notre Bureau que ceci découle de la façon habituelle de procéder de la Ville, à la fois pour les réunions publiques et pour les réunions à huis clos.

45 Conformément au paragraphe 239 (7) de la Loi, une municipalité est tenue de consigner, sans remarques ou commentaires, toutes les résolutions, décisions et autres délibérations de ses réunions. Bien que la Loi interdise d’inclure des notes ou des commentaires au compte rendu officiel, ceci ne veut aucunement dire qu’il ne faut pas faire référence aux sujets discutés lors d’une réunion. Pour conserver des comptes rendus complets et exacts, toutes les questions de procédure et de fond discutées lors d’une réunion à huis clos devraient être consignées.

46 Comme indiqué dans mon rapport du 7 juillet 2010 au sujet de la Ville de South Bruce Peninsula, le compte rendu d’une réunion à huis clos devrait inclure les points suivants :

  • lieu de la réunion;

  • moment où la réunion a commencé et où la séance a été levée;

  • personne qui a présidé la réunion;

  • personnes présentes à la réunion, avec référence spécifique au secrétaire ou autre responsable chargé du compte rendu de la réunion;

  • indication de tout participant parti ou arrivé durant la réunion, avec mention de l’heure de départ ou d’arrivée;

  • description détaillée des questions de fond et de procédure qui ont été discutées, avec référence à tout document spécifique examiné;

  • toute motion, avec référence à la personne qui l’a présentée et à celles qui l’ont appuyée;

  • tous les votes, et toutes les directives données.


47 Dans mon Rapport annuel 2011-2012 sur les réunions publiques, j’ai vivement encouragé les municipalités à faire des enregistrements audio ou vidéo des délibérations du Conseil. C’est le moyen de conserver les comptes rendus les plus clairs et les plus directs pour les enquêteurs chargés d’examiner les réunions à huis clos, et pour aider les responsables municipaux à respecter les exigences juridiques durant les huis clos. De plus en plus de municipalités décident de faire des enregistrements numériques de leurs séances à huis clos, par souci d’exactitude. Parmi elles, citons les suivantes : Villes de Midland, de Welland, d’Oshawa, de Sault Ste. Marie, Municipalités de Brighton et de Lambton Shores.

48 Dans ce cas, disposer d’un enregistrement sonore de la séance à huis clos aurait permis d’obtenir de précieux renseignements durant l’enquête faite par mon Bureau.

 

Opinion

49 Mon enquête a conclu que le Conseil de la Ville de Bracebridge n’avait pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités lorsqu’il s’était retiré à huis clos pour certaines parties de ses réunions du 9 décembre et du 17 décembre, en vertu de l’exception des « renseignements privés ».

50 Je fais les recommandations suivantes pour aider la Ville à s’acquitter de ses obligations légales et à renforcer la transparence de ses réunions.

 

Recommandations

 
Recommandation 1

La Ville de Bracebridge devrait veiller à ce que le procès-verbal de ses réunions à huis clos reflète véritablement le contenu des discussions.

 
Recommandation 2

La Ville de Bracebridge devrait adopter pour pratique de faire des enregistrements audio ou vidéo de ses réunions à huis clos.



 

Rapport

51 Le personnel d’OMLET a parlé avec la secrétaire et le maire le 12 mars 2015, pour leur communiquer le résumé de ces conclusions et pour offrir à la Municipalité la possibilité de les commenter. Tous les commentaires reçus ont été pris en considération pour préparer ce rapport.

52 Mon rapport devrait être communiqué au Conseil de la Ville de Bracebridge et être mis à la disposition du public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion du Conseil.


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André Marin
Ombudsman de l’Ontario



[1] Ordonnance MO-1909, Temiskaming Shores (Ville), 2005 CanLII 56561 (ON IPC)
[2] Ordonnance MO-2204, Aylmer (Ville), 2007 CanLII 30462 (ON IPC)
[3] Ordonnance MO-2368, Clarington (Municipalité), 2008 CanLII 68856 (ON IPC)
[4] Ordonnance MO-2519, Madawaska Valley (Canton), 2010 CanLII 24619 (ON IPC)
[5] Supra, note 1