Enquête visant à déterminer si les membres du Conseil de la Ville d’Elliot Lake ont indûment tenu une réunion à huis clos le 2 juillet 2014
« Autour de la table »
André Marin Ombudsman de l’Ontario
octobre 2014
Plainte
1 Le 17 juillet 2014, mon Bureau a reçu une plainte au sujet d’une rencontre qui avait eu lieu le 2 juillet 2014 lors d’un symposium sur le développement durable, auquel le personnel municipal et des membres du Conseil de la Ville d’Elliot Lake participaient. Cette plainte alléguait que la rencontre constituait une réunion du Conseil, tenue en infraction aux exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités.
Compétence de l’Ombudsman
2 En vertu de la Loi, toutes les réunions d’un conseil municipal, d’un conseil local, et d’un comité de l’un ou de l’autre doivent se tenir en public, sous réserve des exceptions prescrites.
3 Depuis le 1er janvier 2008, des modifications apportées à la Loi accordent aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité s’est dûment retirée à huis clos. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur ou recourir aux services de l’Ombudsman de l’Ontario. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut dans les municipalités qui n’ont pas désigné leur propre enquêteur.
4 Mon Bureau est chargé d’enquêter sur les réunions à huis clos dans la Ville d'Elliot Lake.
5 Lorsque nous enquêtons sur les plaintes à propos de réunions à huis clos, nous déterminons si les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi et le Règlement municipal de procédure pertinent ont été respectées.
Processus d’enquête
6 Lors de leur examen de cette plainte, les membres de mon Équipe d’application de la loi sur les réunions publiques (OMLET) ont parlé au maire et au personnel municipal. De plus, ils ont étudié la documentation communiquée au public à propos de cette rencontre sur le développement durable. Nous avons aussi examiné les extraits pertinents du Règlement de procédure de la Ville et de la Loi.
7 Nous avons obtenu une pleine collaboration lors de notre enquête.
Rencontre
8 Bien que cette plainte porte sur une rencontre le 2 juillet, la Table ronde régionale sur le développement durable (la table ronde) s'est déroulée sur deux jours : les 2 et 3 juillet 2014.
9 La Serpent River First Nation a organisé cette table ronde et l’a annoncée dans un communiqué de presse le 27 juin[1]. Ce communiqué indiquait qu’une discussion le soir du 2 juillet aurait lieu en public, et les organisateurs de l’événement ont informé mon Bureau que les séances en journée étaient elles aussi ouvertes au public. Selon le communiqué de presse, les dirigeants de six municipalités locales et de trois communautés des Premières Nations étaient attendus lors de cette table ronde.
10 Le but de cette table ronde était de dialoguer sur le développement durable des terres traditionnelles des Premières Nations dans la région de la rive nord du lac Huron, en abordant notamment les questions entourant l’exploitation minière et forestière et l’aménagement de lotissements pour des chalets. Les renseignements sur les discussions ont été communiqués au grand public dans une lettre ouverte à la première ministre Kathleen Wynne[2].
11 Le personnel municipal a informé mon Bureau que tous les membres du Conseil avaient été invités à participer à cette table ronde. Toutefois, pour qu’il n’y ait pas quorum du Conseil lors de cet événement, le personnel a fait savoir au Conseil que seuls trois membres – soit un de moins que le quorum – pourraient y assister. Le maire et deux conseillers, de même que l’administrateur en chef, ont pris part à la rencontre.
12 Les souvenirs que le maire a gardés des discussions à la table ronde concordaient avec les renseignements publics. Le maire a déclaré que des discussions de groupe avaient porté sur la manière dont les communautés pourraient collaborer à un objectif de développement durable dans la région. Il s’est souvenu que des membres du public et de la presse étaient présents, à différents moments. L’administrateur en chef a gardé des souvenirs similaires, bien que n’ayant pas été en mesure d’assister à toute la conférence.
13 Nous avons été informés qu’aucune des discussions à la table ronde ne portait spécifiquement sur des questions qui seraient examinées par le Conseil d’Elliot Lake dans un avenir proche et qu'aucun compte rendu officiel n’avait donc été fait au Conseil. Lors de la réunion suivante du Conseil, celui-ci a voté pour nommer l'adjoint au maire au comité directeur du prochain symposium.
Quand une réunion est-elle une « réunion » ?
14 La Loi de 2001 sur les municipalités définit ainsi une « réunion » : « toute réunion ordinaire, extraordinaire ou autre d’un conseil municipal, d’un conseil local ou d’un comité de l’un ou de l’autre »[3]. Cette définition, circulaire, n’est guère utile pour déterminer si une réunion a effectivement eu lieu.
15 Dans un rapport de 2008[4], après avoir examiné la jurisprudence pertinente, à la lumière des objectifs sous-jacents des textes de loi sur les réunions publiques, j’ai élaboré une définition pratique de « réunion » pour faciliter l’interprétation de la définition donnée dans la Loi :
Les membres du Conseil (ou d’un comité) doivent se rassembler en vue d’exercer le pouvoir ou l’autorité du Conseil (ou du comité), ou dans le but de faire le travail préparatoire nécessaire à l’exercice de ce pouvoir ou de cette autorité[5].
16 Cette définition concorde avec les interprétations principales de la loi sur les réunions publiques et renforce le droit qu’a le public d’observer le processus suivi par le gouvernement municipal[6].
Analyse
17 Trois des sept membres du Conseil d’Elliot Lake ont assisté à la table ronde sur le développement durable en juillet 2014. Dans des lettres et rapports précédents sur des réunions à huis clos[7], mon Bureau a mis en garde les conseils municipaux, leur disant que la présence de conseillers à une rencontre tenue par une tierce partie pouvait constituer une réunion illégale à huis clos. Ceci pouvait en effet se produire si les conseillers présents obtenaient des renseignements ou tenaient des discussions qui allaient influencer directement de futures décisions du Conseil.
18 Toutefois, dans ce cas, il n’y avait pas quorum des conseillers d’Elliot Lake à la table ronde. De plus, d’après les conclusions de notre enquête, le Conseil n'a pris aucune décision et n'a fait aucun travail préparatoire en vue de futures décisions du Conseil. Les renseignements obtenus et discutés lors de cette table ronde ne portaient pas non plus sur des questions à l’ordre du jour de futures réunions du Conseil d’Elliot Lake. Par conséquent, les membres du Conseil présents au symposium ne se sont pas rassemblés dans le but d’exercer le pouvoir ou l’autorité du Conseil, ni de faire un travail préparatoire nécessaire à l’exercice de ce pouvoir ou de cette autorité.
Opinion
19 La rencontre qui a eu lieu lors de la table ronde en juillet ne constituait pas une réunion du Conseil d’Elliot Lake aux termes des exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi sur les municipalités.
Rapport
20 Le personnel de mon Équipe d’application de la loi sur les réunions publiques (OMLET) a parlé au maire et à la secrétaire le 21 octobre 2014 pour décrire nos conclusions et leur donner la possibilité de les commenter. Nous avons tenu compte de leurs commentaires dans la préparation de ce rapport.
21 Mon rapport devrait être communiqué au Conseil et mis à la disposition du public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion du Conseil.
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André Marin
Ombudsman de l’Ontario
[1] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletConsultable ici.
[2] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletConsultable ici.
[3] Par. 238 (1)
[4] Ombudsman de l’Ontario, Porte ouverte sur le scandale des billets du concert d’Elton John (25 avril 2008), en ligne.
[5] Ibid, par. 54-60.
[6] London (City) c. RSJ Holdings Inc., [2007] 2 A.C.S. 588, 2007 CSC 29, par. 32; Southam Inc. v. Ottawa (City) (1991), 5 O.R. (3d) 726 (Ont. Div. Ct.), par. 12-18; Southam Inc. v. Hamilton- Wentworth Economic Development Committee (1988), 66 O.R. (2d) 213 (Ont. C.A.), par. 9-12
[7] Voir par exemple la lettre de mon Bureau, datée du 12 juillet 2011, au Canton de Georgian Bay.