Ville de Brockville

Ville de Brockville

août 15, 2022

15 août 2022

L’Ombudsman a examiné une plainte alléguant que le conseil de la Ville de Brockville avait enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités lorsqu’il s’était réuni à huis clos le 13 octobre 2021. Les discussions à huis clos du conseil portaient sur le rendement professionnel d’un(e) employé(e) et sur sa conduite. La plainte soulevait également des préoccupations concernant l’avis au public pour la réunion du 13 octobre 2021 et pour la réunion du 18 octobre 2021. L’Ombudsman a conclu que la discussion à huis clos du conseil le 13 octobre 2021 était permise en vertu de l’exception prévue à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi, pour les renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée. Cependant, le conseil avait enfreint la Loi en omettant d’indiquer par voie de résolution la nature générale de la question à examiner, comme l’exige le paragraphe 239 (4). L’Ombudsman a également conclu que le conseil n’avait pas respecté le paragraphe 238 (2.1) de la Loi le 13 octobre et le 18 octobre 2021, car son règlement de procédure ne prévoit pas la communication d’un avis au public concernant la convocation, le lieu et les délibérations des réunions extraordinaires.

Enquête sur une plainte à propos de réunions tenues par la Ville de Brockville le 13 octobre et le 18 octobre 2021

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Août 2022

 

Plainte

1    Mon Bureau a reçu une plainte à propos de réunions à huis clos tenues par le conseil de la Ville de Brockville (la « Ville ») le 13 octobre et le 18 octobre 2021.

2    La plainte alléguait que la discussion tenue à huis clos par le conseil durant la réunion du 13 octobre 2021 ne relevait d’aucune des exceptions prescrites en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités.

3    La plainte alléguait aussi qu’un avis adéquat n’avait pas été communiqué au public pour les réunions du conseil le 13 octobre et le 18 octobre 2021.

 

Compétence de l’Ombudsman

4    En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités[1] (la « Loi »), toutes les réunions d'un conseil municipal, d'un conseil local et des comités de l'un ou de l'autre doivent se tenir en public, sauf si elles font l'objet d'exceptions prescrites.

5    Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde à quiconque le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité a respecté la Loi en se réunissant à huis clos. Les municipalités peuvent nommer leur propre enquêteur(euse) ou faire appel aux services de l'Ombudsman. La Loi fait de l'Ombudsman l'enquêteur par défaut dans les municipalités qui n'ont pas désigné le(la) leur.

6    L'Ombudsman enquête sur les réunions à huis clos pour la Ville de Brockville.

7    Lorsque nous enquêtons sur des plaintes concernant des réunions à huis clos, nous examinons si les exigences relatives aux réunions publiques énoncées dans la Loi et les procédures de gouvernance de la municipalité ont été respectées.

8    Depuis 2008, mon Bureau a enquêté sur des centaines de réunions à huis clos dans des municipalités de l’Ontario. Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et le public, nous avons créé un recueil en ligne des cas de réunions publiques. Nous avons créé ce recueil interrogeable pour permettre aux intéressé(e)s d'accéder facilement aux décisions de l'Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l'Ombudsman sont consultables dans ce recueil : https://www.ombudsman.on.ca/digest-fr/accueil.

 

Processus d’enquête

9    Le 30 novembre 2021, mon Bureau a informé la Ville de notre intention d’enquêter sur la réunion tenue par le conseil le 18 octobre 2021. Le 8 décembre 2021, nous avons également informé la Ville de notre intention d’enquêter sur la réunion tenue par le conseil le 13 octobre 2021.

10    Les membres de mon équipe chargée des réunions publiques ont examiné les parties pertinentes du règlement de procédure de la Ville, ainsi que de la Loi. Nous avons aussi examiné les comptes rendus des réunions, y compris l’ordre du jour et le procès-verbal. De plus, nous avons examiné les preuves des avis publics fournis pour chaque réunion par la Ville.

11    Au cours de l’enquête, nous avons effectué des entrevues avec sept (des neuf) membres du conseil[2] et avec la greffière /la directrice générale par intérim de la Ville.

12    Mon Bureau a obtenu une entière collaboration dans cette affaire.

 

Réunion du conseil le 13 octobre 2021

13    Le conseil s’est réuni virtuellement pour une réunion extraordinaire le 13 octobre 2021 à 16 h 30. Il a immédiatement adopté une résolution pour se retirer à huis clos, citant l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, et celle des litiges actuels ou éventuels. La résolution n’a pas décrit davantage le sujet de la discussion.

14    Mon Bureau a été informé que, durant la réunion à huis clos, certain(e)s membres du conseil avaient exprimé des préoccupations au sujet du rendement d’un(e) employé(e) et que le conseil avait discuté de la conduite d’une personne.

 

Analyse

Applicabilité de l’exception des litiges actuels ou éventuels

15    Le conseil a cité l’exception des litiges actuels ou éventuels, prévue à l’alinéa 239 (2) e) de la Loi, pour se retirer à huis clos le 13 octobre 2021.

16    Cette exception s’applique en cas de perspective raisonnable de litige[3]. Il ne suffit pas aux membres du conseil d’évoquer une perspective de litige en fonction d’une expérience personnelle[4]. Une simple présomption ou un simple soupçon de litige éventuel ne suffit pas non plus pour que la discussion relève de l'exception[5].

17    Nos entrevues ont confirmé qu’il n’y avait pas de litige en cours lors de la réunion du 13 octobre 2021. Toute préoccupation concernant un litige était hypothétique, si bien que la discussion n’était pas liée à un litige éventuel ou à un litige en cours.

18    Par conséquent, la discussion du conseil le 13 octobre 2021 ne relevait pas de l’exception des litiges actuels ou éventuels.

 

Applicabilité de l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée

19    Le conseil a également invoqué l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi, pour se retirer en séance en huis clos le 13 octobre 2021.

20    En 2021, mon Bureau a examiné une réunion tenue par le conseil de la Ville de Kirkland Lake durant laquelle le conseil avait discuté des relations entre des membres du conseil et le personnel. La discussion avait notamment porté sur la conduite de deux membres du conseil envers le personnel municipal, et sur le rendement au travail d’un(e) employé(e). J’ai conclu alors qu’un examen approfondi de la conduite d’une personne, et une discussion sur son rendement au travail relevaient de l’exception des renseignements privés[6].

21    Dans ce cas, le conseil a discuté du rendement d’un(e) employé(e) et a exprimé des opinions sur la conduite de cette personne.

22    Par conséquent, la discussion tenue à huis clos par le conseil le 13 octobre 2021 relevait de l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée.

 

Résolution adoptée pour se retirer à huis clos

23    Avant de se retirer en séance à huis clos, une municipalité doit adopter une résolution qui énonce la nature générale de la question à examiner[7]. La résolution de se réunir à huis clos devrait donner une description générale de la question à discuter d’une manière qui maximise les renseignements communiqués au public sans compromettre la raison d’exclure le public[8].

24    Dans un rapport de 2016 à la Ville de Brockville, j’ai conclu qu’un comité de la Ville avait enfreint l’obligation de fournir une description générale de sa discussion à huis clos car sa résolution faisait uniquement référence à une exception énoncée dans la Loi[9]. J’ai indiqué qu’avant de se retirer à huis le comité devrait adopter une résolution qui énonce clairement le fait qu’il va tenir une réunion à huis clos et la nature générale des questions à discuter.

25    Lors de sa réunion à huis clos du 13 octobre 2021, le conseil a adopté une résolution de huis clos qui citait les exceptions invoquées afin d’exclure le public. Toutefois, la résolution n’a pas fourni de description plus détaillée de la discussion prévue par le conseil, alors que le paragraphe 239 (4) de la Loi sur les municipalités l’exige. Bien qu’inclure l’exception invoquée pour tenir un huis clos constitue une pratique exemplaire, l’exception à elle seule ne donne pas « la nature générale de la question à examiner ». En général, le fait d’énoncer uniquement l’exception ne satisfait pas aux exigences des règles des réunions publiques.  

26    La Ville devrait s’assurer que ses résolutions de se retirer à huis clos donnent une description générale de la question à discuter d’une manière qui maximise les renseignements communiqués au public sans compromettre la raison d’exclure le public.

 

Avis public

27    De plus, la plainte a soulevé des préoccupations concernant l’avis public des réunions du 13 octobre et du 18 octobre 2021.

28    La réunion du 13 octobre 2021 était une réunion extraordinaire du conseil, qui s’est tenue de 16 h 30 à 18 h 54. La greffière nous a fourni la preuve que l’ordre du jour avait été affiché sur le site Web de la Ville, à titre d’avis de convocation de la réunion, à 9 h 29 lundi 11 octobre 2021, soit plus de 48 heures avant la réunion. L’ordre du jour incluait le mode de la réunion (virtuelle), sa date et son heure. Un peu avant chaque réunion, un onglet « vidéo » est rendu visible et permet au public d’accéder à une diffusion en direct de la réunion.

29    La réunion du 18 octobre 2021 était une réunion extraordinaire du conseil, qui s’est tenue de 18 h 00 à 19 h 55. La greffière nous a fourni la preuve que l’ordre du jour avait été affiché sur le site Web de la Ville, à titre d’avis de la réunion, à 11 h 01 samedi 16 octobre 2021, soit plus de 48 heures avant la réunion. L’ordre du jour incluait le mode de la réunion (virtuelle) sa date et son heure.

30    L’article 4 du règlement de procédure de la Ville stipule que les réunions ordinaires du conseil ont lieu le deuxième mardi et le quatrième mardi de chaque mois à 19 h 00, à moins que le conseil n’en décide autrement par voie de résolution, auquel cas un avis de convocation doit être affiché dans les bureaux municipaux, indiquant l’heure et le lieu de la réunion.

31    Dans le cas des réunions extraordinaires du conseil, l’article 7 du règlement de procédure de la Ville stipule que les membres doivent recevoir un préavis de 48 heures. Le règlement de procédure ne prévoit toutefois pas d’avis public pour les réunions extraordinaires du conseil.

32    Nos entrevues ont révélé que la plupart des membres du conseil ne connaissaient pas bien les exigences de la Ville en matière d’avis public pour les réunions extraordinaires. Certain(e)s membres croyaient que la Ville était tenue de donner un préavis de 48 heures au public, tandis que d’autres pensaient qu’il y avait une exception à l’obligation de préavis pour les réunions extraordinaires.

33    La greffière nous a dit qu’elle avait pour habitude d’afficher les ordres du jour sur le site Web de la ville, à titre d’avis de convocation des réunions extraordinaires du conseil au moins 48 heures avant chaque réunion.

 

Analyse

34    Le paragraphe 238 (2.1) de la Loi stipule que le règlement de procédure de la Ville prévoit un avis public des réunions. Cette exigence s’applique à toutes les réunions du conseil municipal, des comités ou des conseils locaux, y compris aux réunions extraordinaires.

35    Le public doit pouvoir observer le déroulement des réunions. Quand aucun avis concernant la date, l’heure et le lieu d’une réunion n’est communiqué d’avance, la réunion se tient en fait à huis clos. Le règlement de procédure de la Ville devrait énonce l’exigence de communiquer un avis au public pour toutes les réunions, comprenant la date, l’heure et le lieu de chaque réunion[10].

36    L’enquête de mon Bureau a révélé que le règlement de procédure de la Ville n’inclut pas l’obligation de communiquer un avis au public pour les réunions extraordinaires du conseil. Bien que la greffière ait dit à mon Bureau que la Ville a pour habitude d’afficher un avis, le règlement de procédure devrait prévoir un avis public pour les réunions extraordinaires précisant l’heure, le lieu et l’objet de la réunion.

37    Dans un rapport de 2016 à la Ville de Brockville, j’ai indiqué que le règlement de procédure de la Ville devrait exiger explicitement qu’un avis soit communiqué au public pour les réunions extraordinaires du conseil[11]. Pourtant, depuis 2016, la Ville n’a pas actualisé son règlement de procédure. Je profite de cette occasion pour préconiser de nouveau au conseil de modifier son règlement de procédure afin d’exiger qu’un avis soit communiqué au public pour les réunions extraordinaires, comme l’exige la Loi.

 

Opinion

38    Le conseil de la Ville de Brockville n’a pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités le 13 octobre 2021 lorsqu’il s’est réuni à huis clos pour discuter du rendement et de la conduite d’un(e) membre du personnel. La discussion relevait de l’exception des réunions à huis clos pour les renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, prévue à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi.

39    Le conseil de la Ville de Brockville a enfreint le paragraphe 239 (4) de la Loi de 2001 sur les municipalités le 13 octobre 2021 lorsqu’il a omis d’énoncer par voie de résolution la nature générale des questions à examiner à huis clos.

40    Le conseil de la Ville de Brockville a enfreint le paragraphe 238 (2.1) de la Loi de 2001 sur les municipalités en omettant d’inclure l’obligation de communiquer un avis à au public concernant la convocation, le lieu et les délibérations communiquer des réunions extraordinaires dans son règlement de procédure.

 

Recommandations

41    Je fais les recommandations suivantes pour aider la Ville de Brockville à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités et à renforcer la transparence de ses réunions.

 
Recommandation 1

Tous les membres du conseil de la Ville de Brockville devraient s’acquitter avec vigilance de leur obligation individuelle et collective et veiller à ce que le conseil se conforme à ses responsabilités en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités et de son propre règlement de procédure.

 
Recommandation 2

Le règlement de procédure de la Ville de Brockville devrait être modifié pour prévoir un avis public des réunions extraordinaires.

 
Recommandation 3

Le conseil de la Ville de Brockville devrait s’assurer que les résolutions adoptées pour se retirer à huis clos donnent une description générale de la question à examiner d’une manière qui maximise les renseignements communiqués au public sans compromettre la raison d’exclure le public.



 

Rapport

42    Le conseil de la Ville de Brockville a eu l’occasion d’examiner une version préliminaire de ce rapport et de la commenter pour mon Bureau. En raison des restrictions liées à la COVID-19, certaines modifications ont été apportées à notre processus normal d’examen préliminaire et nous remercions le conseil de sa coopération et de sa flexibilité. Aucun commentaire n’a été reçu.

43    Ce rapport sera publié sur le site Web de mon Bureau et devrait être rendu public par la Ville de Brockville. Conformément au paragraphe 239.2 (12) de la Loi sur les municipalités, le conseil est tenu d’adopter une résolution indiquant comment il entend donner suite à ce rapport.

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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] LO 2001, chap. 25.
[2] Deux membres du conseil n’ont pas été interviewé(e)s parce qu’ils(elles) avaient été nommé(e)s à leur poste après la tenue des réunions en question.
[3] Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario à la Ville de Timmins (9 mai 2017), en ligne.
[4] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une réunion à huis clos tenue par le Comité d’examen des politiques de la Ville de Carleton Place le 14 mars 2017, (octobre 2017), au par. 30, en ligne.
[5] Ibid au par. 32.
[6] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une réunion tenue par la Ville de Kirkland Lake le 25 août 2020, (juillet 2021), au par. 29-32, en ligne.
[7] Loi sur les municipalités, supra note 1, par. 239 (4).
[8] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletFarber v Kingston (City), 2007 ONCA 173 (CanLII), en ligne.
[9] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur la réunion à huis clos tenue par le comité spécial de contact avec l’OPP de la Ville de Brockville, le 7 mars 2016, (juillet 2016), au par. 53, en ligne.
[10] Lettre de l’Ombudsman à la Ville de Hamilton (5 janvier 2022) au par. 4, en ligne.
[11] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur la réunion à huis clos tenue par le comité spécial de contact avec l’OPP de la Ville de Brockville, le 7 mars 2016, (juillet 2016), au par. 17, en ligne.