Municipalité de Central Huron

Municipalité de Central Huron

mars 13, 2013

13 mars 2013

L’Ombudsman a conclu que le Conseil de la Municipalité de Central Huron avait enfreint les règles des réunions publiques de la Loi sur les municipalités durant des réunions en mai et juin 2012, mais qu’un huis clos tenu le 11 juin était justifié en vertu des exceptions énoncées dans la Loi.

Enquête sur des réunions à huis clos tenues par le Conseil de la Municipalité de Central Huron le 7 mai, le 11 juin et le 26 juillet 2012

André Marin
Ombudsman de l’Ontario

mars 2013

 

Plainte

1    Notre Bureau a reçu une plainte à propos des pratiques de réunions à huis clos du Conseil de la Municipalité de Central Huron. Cette plainte portait sur les réunions à huis clos tenues le 7 mai, le 11 juin et le 26 juillet 2012. Le plaignant a allégué que ces huis clos s’étaient déroulés sans avis préalable au public.
 


Compétence de l’Ombudsman

2    En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités (la Loi), les municipalités sont tenues d’adopter des règlements qui définissent les règles de procédure des réunions. La Loi stipule qu’elles doivent aviser le public de leurs réunions et que toutes les réunions doivent être publiques, sauf si elles relèvent d’exceptions prescrites.

3    Les citoyens sont en droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité a dûment fermé une réunion au public. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur ou recourir aux services de l’Ombudsman de l’Ontario. La Loi désigne l’Ombudsman en tant qu’enquêteur par défaut pour les municipalités qui n’ont pas nommé leur propre enquêteur.

4    Mon Bureau est, par défaut, l’enquêteur de la Municipalité de Central Huron.

5    Lorsqu’il enquête sur des plaintes à propos de réunions à huis clos, mon Bureau considère si les exigences de la Loi relatives aux réunions publiques, ainsi que le Règlement de procédure applicable, ont été dûment respectés.

 

Processus d’enquête

6    Après avoir effectué un examen préliminaire de la plainte, nous avons avisé la Municipalité de Central Huron le 27 septembre 2012 que nous allions mener une enquête.

7    Durant notre enquête, nous avons obtenu et analysé des documents municipaux pertinents, dont des motions, des ordres du jour, des procès-verbaux et des notes. Nous nous sommes aussi penchés sur le Règlement de procédure de la Municipalité et sur les textes de lois applicables.

   Conformément au paragraphe 19 (1) de la Loi sur l'Ombudsman, les membres du Conseil et le personnel municipal sont tenus de fournir à notre Bureau tout document ou renseignement requis au cours de notre enquête. Les membres du Conseil et le personnel municipal ont pleinement coopéré à notre enquête.

9    Une équipe composée de deux personnes a effectué 11 entrevues téléphoniques avec les membres du Conseil et du personnel municipal concerné.

 

Rapport préliminaire

10    Conformément à nos procédures habituelles, la Municipalité a eu la possibilité d’étudier un rapport comprenant nos constatations et notre analyse préliminaires d’enquête et de faire toute présentation pertinente avant l’achèvement de ce rapport. Les membres du Conseil et du personnel ont pu obtenir un exemplaire du rapport préliminaire, à des fins d’étude, à condition de signer un engagement de confidentialité.

11    Sept membres du Conseil, deux membres du personnel et un ancien employé ont obtenu le rapport préliminaire, à titre temporaire, après avoir signé un engagement de confidentialité. Nous avons reçu deux commentaires à propos de ce rapport préliminaire et nous les avons pris en considération lors de la rédaction de notre rapport final.

 

Procédures de réunions du Conseil

12    Selon le Règlement de procédure de la Municipalité (no 40-2006) les réunions ordinaires du Conseil se tiennent le deuxième lundi de chaque mois à 19 h. Des réunions spéciales peuvent être convoquées, en donnant un avis 24 heures à l’avance aux membres du Conseil. Le Règlement ne précise pas comment le public doit être avisé des réunions spéciales.

13    Le secrétaire est responsable de préparer l’ordre du jour des réunions du Conseil et le Règlement indique que, « dans la mesure du possible », l’ordre du jour sera communiqué aux membres le jeudi avant la réunion. Le Règlement de procédure n’exige pas que les ordres du jour soient affichés à l’intention du public, mais le secrétaire nous a expliqué que la Municipalité a pour habitude d’afficher l’ordre du jour de la réunion à venir sur le site Web de la Municipalité le vendredi avant ladite réunion.

14    Conformément au Règlement de procédure, des ajouts ou des modifications à l’ordre du jour peuvent être demandés par tout membre du Conseil, immédiatement après l’ouverture d’une réunion. La majorité du Conseil doit approuver la modification ou l’ajout pour qu’il soit considéré. Cependant, la majorité des personnes que nous avons interviewées nous ont dit qu’il n’y avait pas de processus officiel pour ajouter des points à l’ordre du jour et que si un conseiller voulait ajouter un point, ce point était en général tout simplement ajouté à l’ordre du jour, sans aucun vote.

15    En ce qui concerne les réunions à huis clos, l’alinéa 10 a) du Règlement de procédure stipule que les réunions seront publiques, à moins que la question à étudier ne porte sur :

  • des renseignements privés;

  • des négociations collectives;

  • l’acquisition, la disposition ou la location-bail de biens-fonds;

  • des conseils juridiques sur des litiges en suspens ou éventuels;

  • des règlements d’assurance;

  • une demande en vertu de la Loi sur les municipalités L.R.O. 1990, c. M. 45, article 442, pour une réduction ou une annulation de taxes en raison d’une maladie grave ou d’une pauvreté extrême.


16    Cette liste ne reflète pas complètement le texte du paragraphe 293 (2) de la Loi de 2001 sur les municipalités (la Loi), qui stipule qu’une réunion ou une partie de réunion peut se tenir à huis clos pour étudier l’une des questions suivantes :

  • la sécurité des biens de la municipalité ou du conseil local;

  • des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, y compris des employés de la municipalité ou du conseil local;

  • l’acquisition ou la disposition projetée ou en cours d’un bien-fonds par la municipalité ou le conseil local;

  • les relations de travail ou les négociations avec les employés;

  • les litiges actuels ou éventuels, y compris les questions dont les tribunaux administratifs sont saisis, ayant une incidence sur la municipalité ou le conseil local;

  • les conseils qui sont protégés par le secret professionnel de l’avocat, y compris les communications nécessaires à cette fin;

  • une question à l’égard de laquelle un conseil municipal, un conseil, un comité ou une autre entité peut tenir une réunion à huis clos en vertu d’une autre loi.


17    La Loi dit aussi qu’une réunion se tiendra à huis clos si la question se rapporte à l’étude d’une demande présentée en vertu de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée.

18    Le paragraphe 239 (2) de la Loi énumère les seules exceptions en vertu desquelles le Conseil peut ou doit se réunir à huis clos. Certains points énumérés dans le Règlement peuvent relever d’autres exceptions, mais d’autres pas. Pour être bien certain de respecter strictement les exigences de la Loi, le Conseil devrait revoir son Règlement et envisager d’utiliser les mêmes énoncés que ceux de la Loi.

 

Constatations d’enquête

19    À la suite de notre enquête, nous avons déterminé que le Conseil avait enfreint les exigences des réunions publiques de la Loi lors de ses réunions du 7 mai et du 26 juillet, mais que la tenue d’un huis clos le 11 juin était justifiée en vertu des exceptions de la Loi.

 

Réunion du 7 mai 2012

20    La réunion du 7 mai était une réunion ordinaire du Conseil. L’ordre du jour de cette réunion a été affiché sur le site Web de la Municipalité.

21    L’ordre du jour du 7 mai ne comprenait aucun point à discuter à huis clos. Au début de la séance publique, un conseiller a demandé un huis clos « pour des raisons personnelles ». Selon le procès-verbal, l’ajout de ce point à l’ordre du jour n’a pas été approuvé par une majorité du Conseil.

22    La résolution de se retirer à huis clos indiquait que le huis clos se tiendrait en vertu de l’alinéa 239 (2) b) de la Loi – des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée.

23    Tout le Conseil était présent au huis clos, ainsi que le directeur administratif intérimaire, le secrétaire et le secrétaire adjoint. D’après les renseignements fournis à notre Bureau, le Conseil a discuté de deux questions à huis clos.

24    La première discussion a porté sur la désignation d’un conseiller au poste de représentant de la Municipalité pour l’assemblée générale annuelle d’ERTH Corporation, fournisseur de services publics et énergétiques dont la Municipalité est actionnaire. Au cours de nos entrevues, nous avons appris qu’au début de la discussion le personnel avait fait remarquer que le point ne se prêtait pas à un huis clos. Le procès-verbal n’en fait pas mention.

25    Le personnel nous a dit que, après avoir clairement constaté que ce point ne relevait d’aucune exception aux exigences des réunions publiques, le Conseil avait décidé de reporter la discussion pour la tenir après le huis clos, en séance publique.

26    Nous avons été informés que cette question devait être réglée à la réunion du 7 mai car l’assemblée générale annuelle d’ERTH Corporation était prévue pour la fin du mois.

27    Le deuxième point de discussion a porté sur les préoccupations qu’avait un conseiller à propos du style des reportages d’un journaliste local. À notre connaissance, le Conseil a envisagé de déposer une plainte officielle auprès de l’employeur de ce journaliste, mais a finalement décidé de ne pas le faire.

28    Nous avons appris qu’un membre du personnel municipal avait dit qu’à son avis la discussion sur le journaliste ne devrait pas se tenir à huis clos. Le procès-verbal n’en fait pas mention. Un conseiller nous a déclaré que « le mécontentement du Conseil à propos du style des reportages » ne se prêtait pas à une discussion à huis clos. Par contre, trois des interviewés ont considéré que le sujet relevait d’un huis clos, étant donné qu’il portait sur des renseignements privés concernant le journaliste nommé.

29    Nous avons été avisés que cette discussion n’avait duré que de trois à quatre minutes. La majorité des personnes que nous avons interviewées nous ont dit que la question n’était pas urgente et qu’elle aurait pu être reportée sur l’ordre du jour de la prochaine réunion.

30    Ayant repris sa séance publique, le Conseil a voté pour désigner le conseiller Barnim en tant que membre ayant droit de vote à l’assemblée générale annuelle d’ERTH Corporation.

31    Durant la séance publique, rien n’a été dit à propos du second point discuté. Nous avons été informés que, généralement, les seuls renseignements donnés lorsque le Conseil reprend une séance publique prennent la forme des motions adoptées à la suite du huis clos.

 

Analyse

32    La Loi sur les municipalités ne définit pas les « renseignements privés ». Toutefois, la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée (MFIPPA) comprend une expression similaire – « renseignements personnels » – qui est définie. Bien que la définition des « renseignements personnels » donnée dans la MFIPPA ne dicte en rien la manière dont devrait être interprétée l’expression « renseignements privés » de la Loi sur les municipalités, elle constitue un point de référence utile.  

33    Le paragraphe 2 (1) de la MFIPPA définit ainsi les renseignements personnels :

« renseignements personnels » : Renseignements consignés ayant trait à un particulier qui peut être identifié. S’entend notamment :

  • de ses opinions ou de ses points de vue personnels, sauf s’ils se rapportent à un autre particulier;

  • des opinions et des points de vue d’une autre personne au sujet de ce particulier;

  • du nom du particulier, s’il figure parmi d’autres renseignements personnels qui le concernent, ou si sa divulgation risque de révéler d’autres renseignements personnels au sujet du particulier.


34    En 2007, une décision du Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée[1] a souligné que, pour être considérés comme des renseignements personnels, les renseignements « doivent être à propos d’un particulier à titre personnel. En règle générale, les renseignements concernant un particulier à titre professionnel, officiel ou commercial ne seront pas considérés comme des renseignements à propos de ce particulier ». Cette décision indiquait aussi que les renseignements concernant un particulier à titre professionnel, officiel ou commercial « peuvent toutefois être considérés comme des renseignements personnels s’ils révèlent quelque chose de nature personnelle à propos de ce particulier ».

35    La discussion à huis clos de la nomination d’un conseiller en tant que représentant municipal à l’assemblée annuelle d’une entreprise ne relève pas des renseignements privés. L’exception des renseignements privés ne peut pas s’appliquer ici, pas plus que toute autre exception. D’après les renseignements fournis, d’autres membres du Conseil et du personnel l’ont souligné au cours de la réunion et le reste de la discussion a été reporté en séance publique. Le procès-verbal du huis clos aurait dû l’indiquer pour que le compte rendu de la réunion soit complet et exact.

36    En ce qui concerne la discussion sur le journaliste, il s’agissait de la réaction d’un conseiller à un titre d’article, et non pas de renseignements privés. Par conséquent, cette question ne relevait pas de l’exception des renseignements privés énoncée à l’article 239 de la Loi et elle n’aurait donc pas dû être discutée à huis clos.

37    Nous n’avons reçu aucune preuve montrant que la question du journaliste local était si urgente, ou présentait de telles contraintes de temps, qu’il fallait  l’ajouter à l’ordre du jour en dernière minute. De plus, les deux points discutés à huis clos ont été ajoutés à l’ordre du jour sans respecter les exigences du Règlement de procédure, stipulant que la majorité du Conseil doit donner son approbation pour qu’un point soit ajouté à l’ordre du jour.

38    Le Conseil devrait éviter d’ajouter des points à un ordre du jour en dernière minute, sauf s’ils sont vraiment urgents et si les contraintes de temps sont telles qu’il est justifié de suspendre les procédures d’avis à donner. Le Conseil devrait alors veiller à respecter strictement les exigences de son propre Règlement de procédure.

 

Réunion du 11 juin 2012

39    La réunion du 11 juin était une réunion ordinaire du Conseil et son ordre du jour a été affiché sur le site Web de la Municipalité. Cet ordre du jour ne comprenait aucun point à discuter à huis clos. Un conseiller a demandé la tenue d’un huis clos « pour discuter d’une question personnelle » et une résolution a été adoptée pour se retirer à huis clos. D’après le procès-verbal, le Conseil n’a pas voté pour ajouter ce point à l’ordre du jour. Aucun autre détail n’a été fourni, si ce n’est une référence à l’exception.

40    D’après les renseignements qui nous ont été donnés, le Conseil a discuté à huis clos d’une question salariale relativement à un membre du personnel identifié. Le Conseil a enjoint au directeur administratif de prendre des mesures pour régler la question, mais aucune motion officielle n’a été adoptée à propos de cette directive.

41    Nous avons été informés que la question n’avait pas été inscrite à l’ordre du jour car le problème n’avait été remarqué par un conseiller qu’après la préparation de cet ordre du jour. La majorité des personnes que nous avons interviewées ont déclaré que la question était urgente, car il était important que l’employé en question soit payé correctement.

42    Après avoir repris sa séance publique, le Conseil n’a fait aucun compte rendu des points discutés à huis clos et il n’a adopté aucune résolution.

 

Analyse

43    La discussion à huis clos portait sur le salaire d’un employé identifié. Dans ces circonstances, le salaire d’un particulier, par opposition à l’échelle salariale d’un poste, relève des renseignements privés à propos d’une personne qui peut être identifiée. Cet avis concorde avec les décisions du Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario, qui a déterminé si des renseignements sur le salaire d’un particulier constituaient des renseignements privés protégés de toute divulgation en vertu de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée et de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée. (Voir par exemple : Ordonnance M 5, Ordonnance 61, Ordonnance 183 et Ordonnance P 273). Par conséquent, il ressort que la discussion relevait de l’exception des renseignements privés concernant une personne qui pouvait être identifiée.

44    Le Conseil a demandé au directeur administratif de faire un suivi de la question mais n’a pas voté. Bien qu’il soit généralement interdit de voter à huis clos, un vote à huis clos est permis si la réunion est dûment fermée au public et si le vote porte sur une question de procédure ou vise à donner des directives aux fonctionnaires, agents, employés ou mandataires de la Municipalité (paragraphe 239 (6)). Par souci de clarté, les directives au personnel devraient être incluses dans une résolution et faire l’objet d’un vote. Ceci contribuerait à éviter toute confusion parmi les membres du Conseil et du personnel quant à la nature exacte des directives données.
 


Réunion du 26 juillet 2012

45    La réunion du 26 juillet était une réunion du Comité plénier et son ordre du jour a été affiché sur le site Web de la Municipalité. L’ordre du jour de cette réunion ne mentionnait aucun point à discuter à huis clos. Selon le procès-verbal de la séance publique, en fin de réunion, le maire a recommandé la tenue d’un huis clos pour discuter d’une question concernant ERTH Corporation. Le procès-verbal ne dit pas si une motion a été adoptée pour ajouter ce point à l’ordre du jour. Une résolution a été adoptée pour se retirer à huis clos en vertu des exceptions suivantes :

  • 239 (2) b) – renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée

  • 239 (2) c) – acquisition ou disposition projetée ou en cours d’un bien-fonds

  • 239 (2) f) – conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat


46    Alors qu’il était en séance à huis clos, le Conseil a discuté de trois questions. La première discussion portait sur une lettre reçue le 23 juillet et envoyée par une entreprise avec laquelle la Municipalité était en pourparlers au sujet d’un projet d’énergie solaire. Nous avons été informés que cette question avait été étudiée en vertu de l’exception du secret professionnel de l’avocat. Bien que quelques conseillers aient tout d’abord dit que l’avocat de la Municipalité avait assisté au huis clos, nous avons confirmé par la suite que ce n’était pas le cas. En revanche, l’avocat était présent à une réunion précédente pour donner des conseils sur une question connexe.

47    Les personnes que nous avons interviewées nous ont dit qu’aucun conseil juridique n’avait été considéré durant le huis clos. La discussion avait porté sur la lettre reçue le 23 juillet.

48    Nous avons été informés que cette question n’avait pas été inscrite à l’ordre du jour car la lettre avait été reçue après la préparation de cet ordre du jour. Les personnes que nous avons interviewées ont donné diverses raisons pour expliquer pourquoi cette question était urgente et ne pouvait pas être reportée à la prochaine réunion du Conseil. Elles ont dit notamment qu’il y avait une échéance pour ce projet d’énergie solaire (mais il nous a été impossible de vérifier quelle était cette échéance), qu’il était important pour le Conseil de pouvoir examiner cette lettre en temps opportun, que le directeur administratif intérimaire s’apprêtait à partir et que le Conseil souhaitait régler la question avant son départ.

49    Le second point discuté à huis clos le 26 juillet était une continuation de la discussion tenue le 11 juin à propos du salaire d’un particulier qui pouvait être identifié.

50    Le troisième point discuté à huis clos portait sur un accord possible de location-bail et l’exception invoquée pour tenir un huis clos était celle de l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds.

51    D’après le procès-verbal de la séance à huis clos, le Conseil a voté à huis clos pour entamer des négociations sur les modalités de cet accord. La majorité des interviewés ont considéré qu’une directive avait été donnée au maire et au directeur administratif leur demandant d’entamer des négociations, même si le vote ne parlait pas de directive. Comme indiqué précédemment, les directives aux fonctionnaires et au personnel devraient être clairement formulées pour éviter toute confusion.

52    Nous avons été informés que cette question était survenue après la préparation de l’ordre du jour et que c’était la raison pour laquelle elle avait été ajoutée en dernière minute. Le personnel nous a dit que la discussion revêtait un caractère urgent car le Conseil ne voulait pas attendre un autre mois (soit jusqu’à la prochaine réunion du Conseil) pour commencer les négociations sur cette location-bail. Un autre membre du Conseil a déclaré que la question aurait probablement pu attendre, mais qu’il avait été bon pour le Conseil d’obtenir une mise à jour.

53    Quand le Conseil a repris sa séance publique, il a adopté une résolution pour « confirmer la décision prise à huis clos ». Aucun autre renseignement n’a été communiqué.

 

Analyse

54    En ce qui concerne la première discussion, qui a porté sur la lettre du 23 juillet envoyée par la société d’énergie solaire, les renseignements fournis à notre Bureau indiquent qu’aucun conseil juridique précis n’a été considéré durant le huis clos. La réunion semble plutôt avoir eu pour but de faire une mise à jour pour le Conseil sur la lettre du 23 juillet.

55    L’exception du secret professionnel de l’avocat peut être invoquée quand le Conseil considère les conseils d’un avocat ou des communications connexes. La plupart des interviewés ont fait savoir à notre Bureau qu’il n’y avait pas eu de discussion spécifique de communications protégées par le secret professionnel de l’avocat durant ce huis clos. Par conséquent, cette question ne relevait pas de l’exception à l’alinéa 239 (2) f). Il ressort donc que ce huis clos n’était pas justifié en vertu de la Loi.

56    La discussion à propos du salaire d’un particulier identifiable et d’un accord-bail semblait cadrer avec les exceptions respectives citées.

 

Résolutions autorisant les huis clos

57    La Loi sur les municipalités stipule qu’avant de tenir une réunion à huis clos, une municipalité doit indiquer ce qui suit par voie de résolution : le fait que la réunion doit se tenir à huis clos et la nature générale de la question devant y être étudiée (paragraphe 239 (4)).

58    Pour toutes les réunions que nous avons examinées, le Conseil avait adopté une résolution avant de se retirer à huis clos, conformément à la Loi. En revanche, la question à étudier était simplement décrite par une reprise de l’énoncé de l’exception de la Loi invoquée par le Conseil pour se retirer à huis clos.

59    Ces résolutions devraient donner des renseignements significatifs sur la question à discuter, sous réserve des besoins de confidentialité. Comme l’a précisé la Cour d’appel de l’Ontario dans Farber v. Kingston City[2], « la résolution de se retirer à huis clos devrait comporter une description générale de la question à discuter, de sorte à maximiser les renseignements communiqués au public, sans porter atteinte à la raison d’exclure le public. »

60    À mon avis, la Loi sur les municipalités exige que la résolution comprenne au moins une brève description de la question à discuter. Dans toute la mesure du possible, cette description devrait être plus qu’une simple reprise de l’énoncé de la Loi.

61    De plus, quand plusieurs questions sont discutées à huis clos, comme lors de la réunion du 26 juillet, le Conseil devrait aussi préciser quelle question est discutée en vertu de quelle exception, par souci de clarté.
 


Méthodes de comptes rendus

62    Conformément au paragraphe 239 (7) de la Loi sur les municipalités, une municipalité doit consigner, sans remarques, toutes les résolutions, les décisions et autres délibérations lors de ses réunions.

63    Au cours de notre enquête, nous avons constaté que les procès-verbaux des huis clos de la Municipalité ne semblent pas toujours indiquer ce qui s’est passé durant ces huis clos. Par exemple, durant le huis clos du 11 juin, une discussion a apparemment eu lieu sur le fait qu’un des points inscrits au huis clos relevait d’une discussion en public. Le procès-verbal ne reflète pas cette discussion.

64    Idéalement, le compte rendu d’une réunion à huis clos devrait inclure les éléments suivants :

  • lieu de la réunion;

  • heure où la réunion a commencé et heure où elle a été ajournée;

  • personne qui a présidé la réunion;

  • personnes présentes, avec mention spéciale du secrétaire ou de toute autre personne officiellement désignée pour dresser le compte rendu de la réunion;

  • arrivée ou départ de tout participant alors que la réunion était en cours, et dans ce cas heure du départ ou de l’arrivée;

  • description détaillée de toute question de fond et de procédure discutée, avec référence à tout document spécifique considéré;

  • toute motion, incluant qui a présenté la motion et qui l’a secondée;

  • tout vote qui s’est déroulé et toute directive qui a été donnée.


65    Bien que la Loi interdise d’inclure toute « remarque » au compte rendu officiel, ceci ne signifie pas que les questions discutées en réunion ne devraient pas être documentées. Les diverses questions de fond et de procédure discutées lors d’une réunion devraient être notées. L’obligation de conserver un compte rendu de réunion devrait être interprétée conformément à l’intention des dispositions des réunions municipales, dont l’objectif est de renforcer l’ouverture, la transparence et la responsabilisation d’un gouvernement municipal.

66    Par souci d’optimiser la transparence, un certain nombre de municipalités de l’Ontario font des enregistrements audio de leurs réunions publiques ou en permettent la diffusion. C’est une façon de faire judicieuse et raisonnable car elle contribue à garantir l’existence de comptes rendus de réunions clairs, complets et accessibles.

67    Aux États-Unis, plusieurs instances exigent que les réunions municipales à huis clos soient enregistrées électroniquement ou sur vidéo, et d’autres ont adopté cette pratique pour renforcer la responsabilisation et la transparence de leurs procédures. Ainsi, en Illinois, l’Open Meetings Act stipule que tous les organismes publics doivent conserver un compte rendu in extenso de toutes leurs réunions à huis clos, sous forme d’un enregistrement audio ou vidéo[3]. De même, en Iowa[4], la loi exige un enregistrement audio de toutes les réunions à huis clos, tandis qu’au Nevada les organismes publics doivent faire un enregistrement audio de leurs réunions publiques et de leurs huis clos, ou faire transcrire les délibérations[5] par un sténographe judiciaire.

67    Comme je l’ai souligné dans mon Rapport annuel 2011-2012 sur les réunions municipales à huis clos[6], il est de l’intérêt de toutes les municipalités ontariennes de faire des enregistrements audio de leurs séances publiques et de leurs séances à huis clos. Ce processus montrerait qu’elles sont convaincues de suivre les règles et inspirerait confiance au public quant à la transparence et à la responsabilisation du gouvernement local. De plus, il permettrait à tous d’économiser du temps et des ressources. Si les enquêteurs chargés des réunions à huis clos pouvaient disposer d’un compte rendu clair et accessible, bien des enquêtes ne prendraient pas plus de temps qu’il n’en faut pour examiner l’enregistrement et le nombre d’enquêtes requises serait beaucoup moins grand. Au cours des derniers mois, un certain nombre de municipalités ont pris une décision en ce sens et j’ai hâte que la pratique devienne généralisée.
 


Ajouts à l’ordre du jour

68    La Municipalité a établi un processus bien précis dans son Règlement de procédure pour permettre l’ajout de points à l’ordre du jour d’une réunion. Une majorité du Conseil doit approuver tout ajout ou toute modification à des fins de considération par le Conseil.

70    Notre examen des délibérations du 7 mai, du 11 juin et du 26 juillet montre que le Conseil n’a pas observé cette exigence de procédure. Lors de ces trois réunions, des points ont été ajoutés en dernière minute à la discussion à huis clos, sans l’approbation de la majorité du Conseil. Apparemment, au moins l’un des points discutés n’était pas urgent et aurait pu être inscrit à l’ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil, ce qui aurait permis de donner un avis au public.

71    Dans d’autres cas – comme dans celui de la correspondance discutée en vertu de l’exception du secret professionnel de l’avocat à la réunion du 26 juillet – l’ordre du jour aurait pu être modifié pour donner plus de préavis au public que certains points seraient discutés. Dans ce cas, le Conseil avait reçu la lettre le 23 juillet, ce qui lui avait laissé trois jours avant sa réunion pour afficher un ordre du jour modifié.

72    Certes, le Conseil est en droit d’ajouter des points de discussion dont le public n’a pas été préalablement avisé, mais il devrait le faire avec modération et considérer que ce processus est exceptionnel. Le Conseil ne devrait pas ajouter de questions en dernière minute sauf si elles présentent une telle urgence ou de telles contraintes de temps qu’il y a une raison impérieuse de suspendre les règles à suivre normalement.
 


Comptes rendus en séances publiques

73    La Municipalité n’a pas pour habitude de faire des comptes rendus de ses réunions à huis clos en séance publique, sauf sous forme de motions qui font l’objet de votes en public à la suite de votes à huis clos.

74     J’encourage les municipalités à rendre publiquement compte du déroulement de leurs séances à huis clos, du moins de manière générale. Dans certains cas, le compte rendu au public peut simplement prendre la forme d’une présentation générale faite en séance publique des sujets considérés à huis clos, qui s’inspire du texte de la résolution autorisant le huis clos, avec des renseignements sur les directives au personnel, les décisions et les résolutions. Dans d’autres cas, la nature des discussions peut justifier des renseignements plus fournis sur la séance à huis clos.

 

Opinion

75    Notre enquête a confirmé que le Conseil de la Municipalité de Central Huron avait tenu indûment des réunions à huis clos le 7 mai et le 26 juillet :

  • Le Conseil a discuté de deux points en vertu de l’exception des renseignements privés lors de sa réunion du 7 mai, ce qui ne cadrait pas avec les paramètres de cette exception, ni de toute autre exception. Cependant, le Conseil a reconnu que la première question ne se prêtait pas à une discussion à huis clos et a reporté cette discussion en séance publique.

  • Le Conseil a discuté d’un point en vertu de l’exception du secret professionnel de l’avocat lors de sa réunion du 26 juillet, ce qui ne cadrait pas avec les paramètres de cette exception.


76    De plus, nous avons identifié des violations de procédure, dont les suivantes :

  • Le Règlement de procédure de la Municipalité ne prévoit pas d’avis à donner au public pour les réunions spéciales. Or le paragraphe 238 (2.1) de la Loi stipule que le Règlement doit prévoir un avis au public pour toutes les réunions.

  • Le Conseil a commis trois violations de procédure quand il a ajouté des points de discussion à son ordre du jour lors des trois réunions que nous avons examinées, et ceci sans respecter les exigences de son Règlement de procédure, stipulant qu’une majorité du Conseil doit approuver tout ajout ou toute modification à des fins de considération.

  • Le Conseil a commis trois violations de procédure quand il a adopté des résolutions pour se retirer à huis clos lors des trois réunions, sans donner de description de la nature générale de la question devant y être discutée, ce qu’exige le paragraphe 239 (4) de la Loi.


77    Durant notre enquête, nous avons aussi observé des pratiques problématiques, dont les suivantes :

  • Le Conseil a ajouté un point de discussion à son ordre du jour en dernière minute, alors que la question n’était pas urgente.

  • Le Conseil a omis de faire un compte rendu de ses discussions à huis clos.

  • Le procès-verbal des huis clos du Conseil ne reflète pas toujours exactement toutes les discussions pertinentes tenues à huis clos.


78    Je fais les recommandations suivantes en espérant qu’elles aideront le Conseil de la Municipalité de Central Huron à s’acquitter de ses obligations légales concernant les réunions à huis clos et à renforcer généralement ses pratiques de réunions à huis clos.

 

Recommandations

Recommandation 1

La Municipalité de Central Huron devrait veiller à ce que ses discussions tenues à huis clos en vertu d’une exception aux exigences des réunions à huis clos énoncées dans la Loi sur les municipalités se limitent aux questions que le Conseil est en droit de discuter à huis clos en vertu des exceptions de la Loi.

 
Recommandation 2

Le Conseil de la Municipalité de Central Huron devrait éviter d’ajouter des points à son ordre du jour, en dernière minute, sauf si ces points sont véritablement urgents. Dans les cas où un point de discussion est porté à l’attention du Conseil après la préparation de l’ordre du jour, le Conseil devrait s’efforcer de modifier l’ordre du jour avant la réunion. Pour tout ajout d’un point à une réunion du Conseil, les exigences du Règlement de procédure devraient être respectées.

 
Recommandation 3

Pour se retirer à huis clos, le Conseil de la Municipalité de Central Huron devrait adopter une résolution donnant une description générale de la question à discuter.

 
Recommandation 4

Pour donner des directives au personnel en séance à huis clos, le Conseil de la Municipalité de Central Huron devrait adopter une résolution qui indique clairement la nature de la directive donnée.

 
Recommandation 5

La Municipalité de Central Huron devrait faire des enregistrements audio ou vidéo de toutes ses réunions à huis clos et les conserver de manière confidentielle et sûre, à titre de références futures.

 
Recommandation 6

Le Conseil de la Municipalité de Central Huron devrait prendre pour habitude de rendre compte publiquement de toutes les questions considérées à huis clos, du moins de manière générale.

 
Recommandation 7

La Municipalité de Central Huron devrait modifier l’article 10 de son Règlement de procédure pour que l’énoncé des exceptions aux exigences des réunions publiques concorde avec celui de l’article 239 de la Loi sur les municipalités.

 
Recommandation 8

La Municipalité de Central Huron devrait revoir son Règlement de procédure pour officialiser sa pratique d’aviser le public de ses réunions en affichant l’ordre du jour sur son site Web le vendredi avant chaque réunion. Il devrait aussi veiller à ce que son Règlement stipule que des avis doivent être donnés au public pour toutes les réunions, y compris pour les réunions spéciales.

 
Recommandation 9

Tous les membres du Conseil de la Municipalité de Central Huron devraient remplir avec vigilance leur obligation personnelle et collective de garantir que le Conseil se conforme à ses responsabilités en vertu de la Loi et de son Règlement de procédure.



 

Rapport

79    Mon rapport devrait être communiqué au public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion du Conseil.

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André Marin
Ombudsman de l’Ontario



[1] Ordonnance MO-2204; (Ville d’Aylmer) (22 juin 2007).
[2] [2007] O.J. no 919, page 151.
[3] 5 ILCS 120/2.06
[4] Iowa Code § 21.5(4)
[5] N.R.S 241.035(4)
[6] Ce rapport se trouve en ligne.