Village de Westport

Village de Westport

février 13, 2015

13 février 2015

L’Ombudsman a conclu que le Conseil municipal du Village de Westport avait enfreint son Règlement de procédure en omettant de communiquer un avis adéquat de sa réunion du 28 octobre 2014.

Enquête visant à déterminer si le Conseil du Village de Westport a tenu une réunion à huis clos illégale le 28 octobre 2014

André Marin
Ombudsman de l’Ontario

Janvier 2015

 

Plainte

1          Le 30 octobre 2014, mon Bureau a reçu une plainte à propos d’une séance à huis clos tenue par le Conseil du Village de Westport le 28 octobre 2014.
 
2          Selon cette plainte, aucun avis de la réunion n’avait été communiqué au public, conformément au Règlement de procédure du Village.
 


Compétence de l’Ombudsman

3          En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités (la Loi), toutes les réunions d’un conseil municipal, d’un conseil local, et d’un comité de l’un ou de l’autre doivent se tenir en public, sous réserve des exceptions prescrites.
 
4          Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité s’est dûment retirée à huis clos. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur ou recourir aux services de l’Ombudsman de l’Ontario. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut dans les municipalités qui n’ont pas désigné leur propre enquêteur.
 
5          Mon Bureau est chargé d’enquêter sur les réunions à huis clos dans le Village de Westport.
 
6          Lorsque nous enquêtons sur les plaintes à propos de réunions à huis clos, nous déterminons si les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi et le Règlement municipal de procédure ont été respectées.
 
 

Élections municipales de 2014

7          Des élections municipales ont eu lieu partout en Ontario le 27 octobre 2014. La réunion en question s’est déroulée le lendemain, soit le 28 octobre – cependant, le Conseil nouvellement élu n’est entré en fonction qu’en décembre 2014. Dans ce rapport, toutes les références au maire et au Conseil ont trait au Conseil tel qu’il était composé lors de cette réunion.
 
 

Processus d’enquête

         L’Équipe d’application de la loi sur les réunions publiques (OMLET) de mon Bureau a examiné les extraits pertinents du Règlement de procédure de la municipalité (Règlement 95-7) et de la Loi, ainsi que la documentation de la réunion du 28 octobre 2014. Elle a aussi parlé au personnel municipal.
 
         Mon Bureau a obtenu une pleine collaboration au cours de cet examen.
 


Procédures du Conseil

10       Le Règlement de procédure du Village stipule que les réunions ordinaires du Conseil se tiennent les deuxième et quatrième lundis de chaque mois, à 19 h, dans la salle du Conseil.
 
11       Conformément au Règlement, le greffier convoque une réunion extraordinaire après avoir reçu une pétition de la majorité des membres du Conseil. La réunion extraordinaire ne peut pas se tenir moins de 48 heures après la réception de la pétition et le greffier doit communiquer un avis écrit de cette réunion extraordinaire dès qu'il reçoit la pétition. En cas de véritable urgence, la réunion peut se dérouler dès que possible.
 
12       L’article 4 du Règlement stipule que toutes les réunions du Conseil doivent se tenir en public, sous réserve des exceptions énoncées dans la Loi.
 


Réunion du 28 octobre 2014

13       La réunion du 28 octobre était une réunion extraordinaire à huis clos du Conseil. Le personnel municipal a avisé mon Bureau que la date de la réunion avait été confirmée auprès des membres du Conseil le 20 octobre, mais qu’en raison de diverses circonstances, l’avis de cette réunion n’avait été affiché publiquement au bureau municipal que le matin du 28 octobre.
 
14       L’ordre du jour de la réunion indiquait que le Conseil se retirerait à huis clos en vertu de l’al. 239 (2) e) de la Loi pour examiner « une question juridique ». L’avocat ferait alors une présentation au Conseil. Le greffier nous a dit que cet ordre du jour n’avait pas été communiqué au public.
 
15       Le greffier nous a dit aussi que la municipalité n’avait pas pour habitude de conserver de procès-verbal public de ses séances à huis clos et qu’aucun procès-verbal public n'avait été dressé pour la réunion à huis clos du 28 octobre. Le procès-verbal de la séance à huis clos indique que le Conseil s'est retiré à huis clos à 18 h 58 pour discuter d’une question juridique en vertu de l’al. 239 (2) e).
 
16       Alors que le Conseil était réuni à huis clos, l’avocat de la municipalité lui a fait une présentation sur un éventuel litige. Durant le huis clos, l’avocat a évoqué l’historique de la question, a fait le point sur la situation actuelle et a présenté des recommandations au Conseil sur les mesures à prendre.
 
17       Le Conseil est sorti du huis clos à 20 h 33 et n’a pas fait de rapport public des discussions tenues à huis clos.
 
 

Analyse

Avis

18       La Loi sur les municipalités ne précise pas quel avis des réunions doit être communiqué au public. En revanche, elle stipule que toute municipalité doit adopter un règlement de procédure indiquant que des avis des réunions doivent être communiqués au public (par. 238 (2.1)).
 
19       Selon le Règlement de procédure du Village, une réunion extraordinaire du Conseil ne peut pas avoir lieu moins de 48 heures après réception d’une pétition demandant la tenue de cette réunion, et le greffier doit communiquer un avis écrit de la réunion extraordinaire dès qu'il a reçu cette pétition.
 
20       Selon les renseignements fournis à notre Bureau, la date de la réunion du 28 octobre avait été décidée le 20 octobre, mais un avis n’a été communiqué au public que la semaine suivante, soit le matin de ladite réunion. Par conséquent, le Village n’a pas communiqué d’avis adéquat de cette réunion au public, ce qui constitue une infraction à son Règlement de procédure.
 
21       Bien que la Loi ne l’exige pas, mais par souci de clarté, la municipalité devrait indiquer dans son Règlement de procédure de quelle manière les avis de ses réunions doivent être fournis au public (par exemple, en affichant les ordres du jour au bureau municipal, ou sur son site Web).
 
 

Discussions durant la séance à huis clos

22       La réunion s’est tenue à huis clos en vertu de l’al. 239 (2) e), « litiges actuels ou éventuels ». Durant le huis clos, l’avocat a donné des renseignements à propos d’un litige éventuel et a fourni des conseils sur les mesures à prendre. Bien que le litige n’ait pas été entamé alors, la municipalité avait assez de raisons pour prévoir une possibilité réelle de litige. Comme précisé dans R.(C.) v. CAS of Hamilton[1] :

Il ne faut pas nécessairement qu’un litige ait été entamé, pas plus qu’il n’est « nécessaire que le litige ait été créé au moment où il y a certitude de litige, mais il faut simplement qu’un litige s’avère raisonnablement possible. Par contre, il doit y avoir plus qu’un simple soupçon de futur litige. »


23       Par conséquent, les discussions tenues à huis clos le 28 octobre relevaient de l’exception citée. L’exception des « conseils qui sont protégés par le secret professionnel de l’avocat » (al. 239 (2) f)) aurait aussi pu s’appliquer à cette discussion. Comme je l’ai précisé dans mon rapport de 2009 sur le Canton d’Emo : « L’exception concernant les conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat (peut uniquement être invoquée) si le Conseil considère réellement les conseils d’un avocat, ou toute communication connexe. »[2]
 
 

Questions de procédure

Résolution pour se retirer à huis clos

24       Conformément au paragraphe 239 (4) de la Loi, avant de se retirer à huis clos, le Conseil doit adopter une résolution indiquant qu’il va tenir un huis clos, ainsi que la nature générale de la question à examiner alors.
 
25       Comme indiqué par la Cour d’appel de l’Ontario dans Farber v. Kingston City[3], « la résolution de se retirer en séance à huis clos devrait comporter une description générale de la question à discuter, de sorte à maximiser les renseignements communiqués au public, sans toutefois porter atteinte à la raison d’exclure le public ».
 
26       Le 28 octobre 2014, le Conseil s’est retiré à huis clos pour discuter d’une « question juridique » en vertu de l’alinéa 239 (2) e) de la Loi. Aucun autre renseignement n’a été donné. Pour s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi, le Conseil devrait donner une description de la question à examiner à huis clos. Il devrait procéder ainsi pour maximiser les renseignements communiqués au public sur les points de discussion, sans toutefois porter atteinte à la raison de se retirer à huis clos.
 
 

Compte rendu de réunion

27       Conformément au par. 239 (7) de la Loi, une municipalité doit consigner sans remarque ni commentaire, toutes ses résolutions, décisions et autres délibérations, aussi bien pour ses réunions publiques que pour ses réunions à huis clos. Mon Bureau a été informé que la municipalité n’avait pas pour habitude de dresser de procès-verbal public de ses réunions à huis clos.
 
28       Bien que toutes les discussions de fond aient eu lieu durant la séance à huis clos de la réunion du 28 octobre, le Conseil devait tenir une séance publique, même brève, durant laquelle il devait adopter une résolution pour se retirer à huis clos. Le Conseil devrait prendre pour habitude de conserver un procès-verbal public consignant cette partie de la réunion.
 
 

Compte rendu

29       Après sa séance à huis clos du 28 octobre, le Conseil n’a pas fait de rapport de ses discussions. J’encourage les conseils municipaux à rendre compte de leurs délibérations à huis clos, au moins de manière générale. Dans certains cas, les comptes rendus au public peuvent simplement prendre la forme d’une discussion générale, en public, des sujets examinés à huis clos, et refléter les renseignements donnés dans la résolution pour se retirer à huis clos, avec des renseignements sur les directives données au personnel, les décisions et les résolutions. Dans d’autres cas, la nature des discussions peut prêter à communiquer au public d’importants renseignements sur la séance à huis clos.
 
30       Tout comme la résolution de se retirer à huis clos, le rapport du Conseil devrait être inclus au procès-verbal public.

 

Opinion

31       Mon enquête a conclu que le Conseil du Village de Westport avait enfreint son Règlement de procédure en omettant de donner un avis adéquat de sa réunion du 28 octobre 2014.
 
32       Je fais les recommandations suivantes dans l’espoir qu’elles aideront le Conseil à améliorer la transparence de ses réunions à huis clos :

 

Recommandations

 

Recommandation 1

Le Village de Westport devrait modifier son Règlement de procédure pour indiquer comment le public doit être avisé de ses réunions extraordinaires.

 
Recommandation 2

Le Village de Westport devrait veiller à ce que des avis adéquats soient communiqués pour toutes ses réunions extraordinaires, conformément aux exigences de son Règlement de procédure.

 
Recommandation 3

Le Village de Westport devrait veiller à ce que les résolutions adoptées pour se retirer à huis clos donnent une description de la question à examiner, de sorte à maximiser les renseignements communiqués au public, sans porter atteinte à la raison d’exclure le public.

 
Recommandation 4

Le Village de Westport devrait veiller à conserver des procès-verbaux publics de ses réunions à huis clos qui incluent la résolution adoptée pour se retirer à huis clos, ainsi que tout rapport fait par le Conseil après la reprise de sa séance publique.

 
Recommandation 5

Le Village de Westport devrait prendre pour habitude de faire un rapport public à l’issue de ses séances à huis clos.



 

Rapport

33       Le personnel d’OMLET a parlé avec le maire et le greffier le 16 janvier pour leur donner un aperçu de ces conclusions et pour offrir à la municipalité la possibilité de les commenter. Tout commentaire reçu a été pris en considération dans la préparation de ce rapport.
 
34       Mon rapport devrait être communiqué au Conseil du Village de Westport et mis à la disposition du public au plus vite, au plus tard lors de la prochaine réunion du Conseil.
 
 
___________________
André Marin
Ombudsman de l’Ontario

 

[1] R.(C.) v. CAS of Hamilton (2004), 50 RFL (5th) 394 (Ont. S.C.J.) au par. 21, citant Carlucci v. Laurentian Casualty Co. of Canada (1991), 50 CPC (2d) 62 (Ont. Ct. (Gen Div.))
[2] Ombudsman de l’Ontario, Gouverner la municipalité dans la furtivité (30 janvier 2009), en ligne.
[3] [2007] O.J. No. 919, page 151