Ville du Grand Sudbury

Ville du Grand Sudbury

janvier 20, 2017

20 janvier 2017

L’Ombudsman a reçu une plainte alléguant que le Conseil s’était retiré à huis clos pour discuter d’un rapport sur des contrats entre la Ville et un distributeur de billets de transport. La plainte alléguait aussi que le Conseil avait voté à huis clos de radier un compte irrécouvrable, avant de voter sur la question en séance publique le 31 mai 2016.

L’Ombudsman a conclu que le Conseil n’avait pas enfreint la Loi sur les municipalités quand il s’était retiré à huis clos pour discuter de ce rapport le 2 mars et le 23 mars 2016, en vertu des exceptions des renseignements privés et des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat, et quand il s’était retiré à huis clos en vertu de l’exception des renseignements privés le 26 avril 2016. De plus, l’Ombudsman a aussi déterminé que le Conseil n’avait pas voté indûment à huis clos au sujet du compte irrécouvrable.

Enquête visant à déterminer si le conseil de la Ville du Grand Sudbury a tenu des réunions à huis clos illégales le 2 mars, le 23 mars et le 26 avril 2016

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Janvier 2017

 

Plainte

1 Le 1er juin 2016, mon Bureau a reçu une plainte à propos d’une réunion à huis clos, ou de réunions à huis clos tenues par le Conseil de la Ville du Grand Sudbury avant sa réunion publique du 31 mai 2016.

2 La plaine portait sur un vote tenu durant la réunion publique du 31 mai, quand le Conseil a voté pour radier un compte irrécouvrable d'un montant supérieur à 500 000 $, lié à des contrats entre la Ville et un distributeur de billets de transport.

Le plaignant croyait que la décision de radier le compte irrécouvrable découlait d’une recommandation faite dans un rapport préparé par Investigative Solutions Networks Inc. (ISN), tierce partie indépendante dont le Conseil avait retenu les services pour étudier la question.

4 Comme il n’y avait pas eu de débat en séance publique avant le vote du 31 mai, le plaignant pensait que le Conseil avait discuté de la question et avait décidé à cet égard durant un huis clos, avant la réunion publique du 31 mai.

5 Le plaignant a allégué que ni le rapport d’ISN, ni le compte irrécouvrable, ne se prêtaient à des discussions en séance à huis clos et il s’est plaint que le Conseil avait donc enfreint les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités (la Loi).

 

Compétence de l’Ombudsman

En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités, toutes les réunions d'un conseil municipal, d'un conseil local et des comités d'un conseil doivent se tenir en public, sous réserve des exceptions prescrites.

7 Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité s’est dûment retirée à huis clos en vertu de la Loi. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur ou recourir aux services de l'Ombudsman de l'Ontario. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut dans les municipalités qui n’ont pas désigné leur propre enquêteur.

8 L’Ombudsman est chargé d’enquêter sur les réunions à huis clos pour la Ville du Grand Sudbury.

9 Lorsque nous enquêtons sur les plaintes à propos de réunions à huis ‎clos, ‎nous ‎déterminons si ‎les exigences des réunions publiques énoncées ‎dans la Loi et le Règlement de procédure de la Municipalité ont été ‎respectées.

 

Procédures du Conseil

10 Le Règlement de procédure du Conseil (Règlement 2011-235) stipule que les réunions peuvent se tenir à huis clos conformément à l’article 239 de la Loi sur les municipalités. Le Conseil ne peut voter à huis clos que si le vote porte sur une question de procédure ou vise à donner des directives ou des instructions au personnel, conformément au paragraphe 239 (6) de la Loi.

 

Processus d’enquête

11  Le 20 juin 2016, après avoir effectué un examen préliminaire, nous avons avisé la Ville que nous enquêterions sur cette plainte.

12 Les membres du personnel de mon Bureau ont examiné les extraits pertinents du Règlement de procédure de la Ville et de la Loi, ainsi que la documentation de ces réunions, dont le procès-verbal de la séance à huis clos et le rapport d’ISN. Ils ont aussi parlé au maire et au personnel municipal.

13 Mon Bureau a obtenu une pleine collaboration dans ce dossier.

 

Contexte : Le problème des billets de transport

14  En 1999, la Ville a conclu un accord avec l’exploitant du Zio’s In-Transit Café, un commerce situé dans le Centre du transit de Sudbury, pour vendre des billets de loterie et des laissez-passer de transport en commun. Le contrat allait du 1er avril 1999 au 31 août 2002, puis se continuait au mois par mois, le temps que la Ville effectue un processus d’approvisionnement.

15 L’exploitant du Café était le seul soumissionnaire de ce processus d’approvisionnement et en juin 2004 la Ville a conclu un accord avec la société qui exploitait Zio’s Tuck Shop, pour que cet établissement tienne un kiosque de vente des billets et de renseignements au Centre du transit. Zio’s Tuck Shop était payé pour tenir ce kiosque et la Ville lui fournissait des billets de transport en consignation.

16  Au fil des années, la société a pris des retards dans ses paiements de billets de transport. Un examen fait en 2011[1] par Brian Bigger, alors vérificateur de la Ville (maintenant maire), a découvert qu’à la signature du contrat en juin 2004, après le processus d’approvisionnement, la société devait déjà plus de 250 000 $ à la Ville.

17 Le contrat initial a pris fin le 31 janvier 2006, alors que dette avait atteint 340 000 $. Le contrat comprenait une clause de renouvellement, et a été renouvelé annuellement, jusqu’à sa toute fin le 4 septembre 2009, alors que la société devait 866 537 $. Une partie de cette dette a été remboursée, mais l’exploitant a cessé de faire des paiements alors que les impayés étaient de plus de 500 000 $.

18 Cette situation a mené à ce qu’on a appelé « le scandale des billets de transit ». Durant la campagne électorale de 2014, Brian Bigger, qui est maintenant maire, a déclaré que s’il était élu il réexaminerait la question en détail. En septembre 2015, la Ville a retenu les services d’ISN pour effectuer un examen indépendant du problème.

 

Les réunions

19 Le personnel municipal a fait savoir à notre Bureau que le rapport d’ISN avait été examiné lors de trois réunions à huis clos le 2 mars, le 23 mars et le 26 avril 2016.
 

Réunion extraordinaire du 2 mars 2016

20 Lors de la réunion du 2 mars, le Conseil s’est retiré à huis clos pour discuter de deux questions, l’une étant l’enquête et le rapport d’ISN. La discussion s’est tenue à huis clos en vertu des exceptions des « renseignements privés » et du « secret professionnel de l’avocat » énoncées aux alinéas 239 (2) b) et f) de la Loi. Le Conseil a adopté une résolution pour se retirer à huis clos en vertu de ces exceptions. Aucun autre renseignement n’a été donné dans la résolution à propos de la discussion qui allait se tenir à huis clos.

21  Alors que le Conseil était réuni à huis clos, il a pris acte du rapport complet et du rapport sommaire d’ISN. Des versions expurgées du rapport complet et du sommaire sont maintenant affichées en ligne sur le site Web[2] de la Ville, mais elles n’avaient pas encore été communiquées au public à l’époque de la réunion.

22 Le sommaire décrivait l'objet de l’enquête d’ISN, qui était notamment de déterminer si un employé quelconque de la Ville avait fait preuve de négligence notable dans la gestion du compte du kiosque de transit, et si un employé municipal ou un membre du Conseil s’était trouvé en conflit d’intérêts, avait enfreint une loi de l’Ontario ou une loi fédérale dans ses rapports avec l’exploitant du kiosque et/ou ses sociétés. Le Conseil a aussi été informé de l'opinion d'un avocat sur les conclusions d’ISN.

23 Le directeur général intérimaire, qui était aussi le greffier de la réunion, et l’avocat représentant la Ville ont tout d’abord fait une présentation de diapositives au Conseil, dont une copie a été remise à notre Bureau. Des représentants d’ISN étaient présents à la réunion pour répondre aux questions du Conseil.

24 La présentation a résumé l’enquête d’ISN et l’opinion juridique, ainsi que les options possibles pour communiquer les conclusions d’ISN au public. La présentation de diapositives a aussi compris un aperçu de nouvelles politiques et initiatives, dont un code de conduite des employés et un processus de règlement des plaintes établi à la lumière du « scandale des billets de transit ». L’une des diapositives, intitulée « éliminer des créances douteuses » citait le montant irrécouvrable de plus de 500 000 $ et soulignait que ce montant avait été radié en 2009, mais restait inscrit aux provisions des créances douteuses[3].

25 Le procès-verbal de la séance à huis clos ne donne aucun renseignement sur la teneur de la discussion. Le personnel a informé notre Bureau que le Conseil n’avait pas eu le temps de regarder toute la présentation de diapositives et n'avait pu examiner que les 11 premières pages du rapport d’ISN, ainsi qu'une partie des conseils juridiques connexes, lors de la réunion du 2 mars. Il n'y avait donc pas eu de discussion sur le compte douteux, le plan de communications ou les options de divulgation du rapport, et le reste de la présentation avait été remis à la réunion du 23 mars.

26 D’après le personnel et le maire, la discussion du 2 mars a permis aux membres du Conseil d’obtenir des renseignements généraux sur le problème des billets de transport, le rôle et le mandat d’ISN et ses conclusions.

 

Réunion extraordinaire du 23 mars 2016

27 Lors de la réunion du 23 mars, le Conseil s’est retiré à huis clos pour discuter de deux questions, dont l’une portait sur l’enquête d’ISN. Une fois de plus, la discussion du rapport d’ISN s’est tenue à huis clos en vertu des exceptions des « renseignements privés » et du « secret professionnel de l’avocat ». Le Conseil a adopté une résolution pour se retirer à huis clos, en citant ces exceptions. La résolution n’a donné aucun autre détail sur la discussion qui allait se tenir à huis clos.

28 Le procès-verbal ne fournit aucun renseignement sur la teneur de la discussion à huis clos. Le personnel a fait savoir à mon Bureau que cette réunion faisait suite à celle du 2 mars, avec la présentation des mêmes diapositives et des mêmes documents au Conseil.

29 Le directeur général intérimaire, qui était une fois de plus le greffier de la réunion, a expliqué au Conseil les conseils juridiques que la Ville avait obtenus sur l’enquête d’ISN et il a passé en revue les options de divulgation des conclusions.

30 En ce qui concerne les options de divulgation, le maire a avisé notre Bureau que la Ville avait dû tenir compte à la fois de son désir de transparence et de son obligation de protéger la vie privée des employés impliqués. Lors de son examen du problème des billets de transport, ISN avait enquêté sur les rôles de divers employés, et une grande partie des renseignements contenus dans son rapport était de nature personnelle. Nous avons été informés que la plus grande partie des discussions à huis clos avait porté sur des questions de performance des employés.

31  En ce qui concerne les diverses politiques citées dans les diapositives, le directeur général intérimaire a fait savoir à notre Bureau que celles-ci n’avaient pas été incluses pour être discutées à huis clos, mais pour rappeler au Conseil quelles mesures étaient prises afin de régler les problèmes cernés par ISN.

32 Le maire et le personnel ont fait savoir à notre Bureau que la radiation du compte douteux n’avait pas été discutée à huis clos. Le sujet avait été inclus aux diapositives, car il était lié au problème des billets de transit, mais il allait être étudié en séance publique.

33 Le seul vote à huis clos inscrit au procès-verbal concernait une directive donnée au directeur général intérimaire. Comme ce vote à huis clos portait sur une directive au personnel, il était autorisé en vertu de l’alinéa 239 (6) b) de la Loi sur les municipalités et du Règlement de procédure de la Ville.
 


Séance à huis clos du 26 avril 2016

34  Lors de la réunion du 26 avril, le Conseil s’est retiré à huis clos pour discuter de renseignements privés en vertu de l’alinéa 239 (2) b) de la Loi. Le Conseil a adopté une résolution citant cet article de la Loi, sans donner aucun autre renseignement.

35 En séance à huis clos, le directeur général intérimaire a discuté des répercussions du rapport d’ISN en matière d’emploi.

36 Le Conseil a voté à huis clos pour enjoindre au directeur intérimaire/au directeur des ressources humaines, de travailler avec le maire afin de communiquer verbalement les résultats de l’examen d’ISN et de rendre public un rapport expurgé. Tout comme pour le vote du 23 mars, cette directive donnée à huis clos au personnel était permise.

 

Réunion publique du 31 mai 2016

37 Une séance à huis clos a eu lieu le 31 mai avant la réunion publique du Conseil, mais le rapport d’ISN n’a pas été discuté durant le huis clos ce jour-là.

38 Un rapport du gestionnaire de la comptabilité au sujet de la dette résultant du problème des billets de transport était joint à l’ordre du jour de la réunion publique. Le rapport soulignait que la dette, de 578 909,53 $, remontait à 2009 et que le fait de décider de la radier n’empêcherait en rien la Ville de percevoir des fonds une fois que serait rendu le jugement contre la société responsable.

39 La radiation entraînerait la suppression de la créance du solde des comptes débiteurs et celle de la provision afférente des registres financiers de la Ville. Le trésorier intérimaire et l’avocat représentant la Ville ont tous deux recommandé au Conseil de radier la créance irrécouvrable.

40 Durant la séance à huis clos, le Conseil a voté :

QUE la Ville du Grand Sudbury approuve la radiation d’une créance irrécouvrable d’un montant de 578 909,53 $, de 1211250 Ontario Inc.


41 Le procès-verbal ne rend compte d'aucune discussion sur la question. Le greffier a informé notre Bureau qu’il n’y avait pas eu de débat, car le seuil de radiation des créances irrécouvrables est plutôt bas. Le Conseil suit souvent les recommandations du service des finances à cet égard.

 

Analyse

42 La plainte à notre Bureau alléguait que le Conseil avait discuté à huis clos de la décision de radier un compte irrécouvrable résultant du problème des billets de transport, étant donné qu’il n’y avait pas eu de débat avant le vote en séance publique le 31 mai. Le plaignant croyait que la décision de radier cette dette découlait des recommandations du rapport d’ISN.

43 Notre enquête a conclu que le rapport d’ISN ne traitait pas du compte irrécouvrable, et rien ne prouve que le Conseil ait discuté de cette créance en séance à huis clos. Le personnel a fait savoir à mon Bureau que, pour décider de radier cette créance, le Conseil avait suivi la recommandation du rapport du personnel, qui était joint à l’ordre du jour de la séance publique du 31 mai.

44 La plainte alléguait aussi que le rapport d’ISN ne se prêtait pas à une discussion à huis clos. Ce rapport a été discuté lors de trois réunions à huis clos avant le 31 mai.

45 Le 2 mars 2016, le Conseil a discuté du rapport en vertu des exceptions des renseignements privés et du secret professionnel de l’avocat. Une copie des conseils juridiques donnés par un avocat externe a été remise aux membres du Conseil, et ces conseils ont été résumés dans les diapositives présentées par le directeur général intérimaire. L’objectif de la séance à huis clos du 2 mars était de discuter du mandat d’ISN et de donner un aperçu général des conclusions d’enquête. Comme indiqué dans le sommaire, ISN enquêtait sur plusieurs questions liées à des négligences et des conflits d’intérêts potentiels de la part d’employés.

46 La réunion du 23 mars était une prolongation de la réunion du 2 mars, et elle s’est tenue à huis clos elle aussi en vertu des exceptions des renseignements privés et du secret professionnel de l’avocat. Le Conseil a discuté de la performance d’employés, dont les détails étaient donnés dans le rapport d’ISN. De plus, le Conseil a examiné une opinion juridique.

47 La réunion du 26 avril a eu lieu à huis clos en vertu de l’exception des renseignements privés, et le Conseil a discuté alors des répercussions des conclusions d’ISN sur certains membres du personnel.

 

Exception des « renseignements privés »

48 Pour déterminer si des discussions sur l’emploi d’une personne en particulier relèvent de l’exception des « renseignements privés », notre Bureau a examiné des décisions du Bureau du commissaire à l’information et à la protection de la vie privée (CIPVP), expliquant quand des renseignements professionnels deviennent personnels. Bien que ces décisions ne soient pas contraignantes pour mon Bureau, elles peuvent s’avérer informatives.

49 En général, le CIPVP a conclu que, pour être considérés comme « des renseignements privés », les renseignements doivent concerner une personne à titre personnel, plutôt que professionnel (voir CIPVP, Ordonnance MO-2204). Cependant, des renseignements donnés sur une personne à titre professionnel peuvent être considérés comme des renseignements privés, s’ils révèlent quelque chose de nature personnelle, ou s'ils ont trait à l’examen de la conduite de cette personne (voir Ordonnances MO-2368 et MO-2519 du CIPVP).

50 Dans un récent rapport sur le Village de Burk’s Falls et le Canton d’Armour Township[4], nous avons conclu qu’une discussion comportant des allégations négatives sur la conduite et la performance professionnelles d’un employé allait au-delà des renseignements professionnels, et portait sur des renseignements personnels. De même, dans un rapport daté du 28 janvier 2009, l’enquêteur chargé des réunions à huis clos pour la Ville d’Ottawa a souligné que des discussions qui contestaient le jugement d’un employé nommé, dans le cadre de ses fonctions, pouvaient se tenir à huis clos en vertu de l’exception des renseignements privés.

51 Une grande partie des renseignements contenus dans le rapport d’ISN étaient de nature personnelle, car ils portaient sur un examen de la conduite d'employés de la Ville dans cette affaire de billets de transport. Les renseignements communiqués à notre Bureau montrent que ces renseignements privés ont fait l'objet des discussions lors des trois réunions à huis clos. L’exception des « relations de travail » énoncée à l’alinéa 239 (2) d) de la Loi aurait pu s’appliquer elle aussi.

52 La présentation de diapositives lors des séances à huis clos du 2 mars et du 23 mars comprenait des renseignements qui ne relèvent généralement pas des discussions à huis clos – à savoir la politique de communications, le code de conduite des employés et la radiation d’une créance douteuse. Toutefois, le maire et le personnel nous ont fait savoir que ces points avaient été inclus aux diapositives à titre de renseignements pour le Conseil, étant donné qu’ils avaient trait au problème des billets de transport, mais qu’ils n’avaient pas été discutés durant la séance à huis clos.

53 L’exception des renseignements privés s’appliquait aux discussions à huis clos pertinentes des réunions du 2 mars, du 23 mars et du 26 avril.

 

Exception du « secret professionnel de l’avocat »

54 Comme mon Bureau l’a souligné dans plusieurs rapports, dont un rapport récent sur la Ville de London[5], cette exception peut être invoquée uniquement quand le Conseil a réellement des conseils d’un avocat ou des communications connexes à examiner.

55 Les communications ne peuvent être protégées par le secret professionnel de l’avocat que si : a) elles ont lieu entre un client et son avocat, l’avocat agissant à titre professionnel; b) elles sont faites dans le but de solliciter ou de recevoir des conseils juridiques; et c) elles sont censées demeurer confidentielles[6].

56 Lors de la réunion du 2 mars et de la réunion du 23 mars, le Conseil avait à examiner des renseignements juridiques spécifiques donnés par un avocat. Par conséquent, l’exception à l’alinéa 239 (2) f) s’appliquait à ces réunions.

 

Questions de procédure

Résolution pour se retirer à huis clos

57 Lors des trois réunions, le Conseil n’a donné aucun renseignement dans la résolution adoptée pour se retirer à huis clos à propos des discussions qui allaient avoir lieu, citant uniquement l’article (les articles) de la Loi autorisant les discussions à huis clos.

58  Comme indiqué par la Cour d’appel dans Farber v. Kingston City[7], « la résolution de se retirer en séance à huis clos devrait comporter une description générale de la question à discuter, de sorte à maximiser les renseignements communiqués au public, sans toutefois porter atteinte à la raison d’exclure le public ». Dans ses résolutions pour se retirer à huis clos, le Conseil devrait donner une brève description de la question à examiner à huis clos, en plus de reprendre l’exception ou les exceptions spécifiques invoquées.

 

Comptes rendus des réunions

59 Le procès-verbal de la séance à huis clos de ces réunions ne donne aucun renseignement spécifique sur les discussions tenues. Conformément au paragraphe 239 (7) de la Loi, une municipalité doit consigner, sans remarques, toutes les résolutions, décisions et autres délibérations de ses réunions publiques et de ses réunions à huis clos. Bien que la Loi interdise d’inclure des remarques aux comptes rendus officiels, ceci ne signifie aucunement que les sujets discutés en réunion ne doivent pas être documentés.

60  Comme l’a précisé notre Bureau dans un rapport du 7 juillet 2010 sur des réunions du Conseil de la Ville de South Bruce Peninsula[8], le compte rendu d’une réunion à huis clos devrait faire référence aux points suivants :

  • lieu de la réunion;

  • moment où la réunion a commencé et où la séance a été levée;

  • personne qui a présidé la réunion;

  • personnes présentes à la réunion, avec référence spécifique au greffier ou autre responsable chargé du compte rendu de la réunion;

  • indication de tout participant parti ou arrivé durant la réunion, avec mention de l’heure de départ ou d’arrivée;

  • description détaillée des questions de fond et de procédure qui ont été discutées, avec référence à tout document examiné;

  • toute motion, avec référence à la personne qui l’a présentée et à celles qui l’ont appuyée;

  • tous les votes tenus, et toutes les directives données.

 
61  De plus en plus de municipalités optent pour un enregistrement numérique de leurs séances à huis clos, par souci d'exactitude. À notre connaissance, 17 municipalités suivent maintenant cette pratique en Ontario, dont les Villes de Brampton, Oshawa et Niagara Falls et la Municipalité de Brighton. En octobre cette année, le Conseil de la Ville de London a voté pour faire un enregistrement audio de ses réunions à huis clos.

62 Comme l’indique le Guide des réunions ouvertes au public – Loi sur la transparence[9] publié par mon Bureau, nous encourageons fortement les municipalités à faire des enregistrements audio ou vidéo des délibérations du Conseil. Pour les enquêteurs chargés des réunions à huis clos, c’est le moyen le plus clair et le plus accessible de vérifier les faits. C'est aussi un processus qui contribue à garantir que les responsables ne s’écartent pas de leurs obligations légales durant les réunions à huis clos.

 

Opinion

63 La plainte à mon Bureau alléguait que le Conseil de la Ville du Grand Sudbury avait indûment discuté à huis clos d’un rapport préparé par Investigative Solutions Networks Inc. (ISN), et qu’il avait voté illégalement durant le huis clos pour radier un compte irrécouvrable, en s’appuyant sur les recommandations de ce rapport.

64 Le Conseil a discuté du rapport d’ISN lors de trois réunions à huis clos avant sa réunion publique du 31 mai : le 2 mars, le 23 mars et le 26 avril 2016. Mon enquête a conclu que la Ville du Grand Sudbury était en droit d’invoquer les exceptions aux alinéas 239 (2) b) et 239 (2) f) de la Loi quand il s’est retiré à huis clos le 2 mars et le 23 mars 2016. Le Conseil était en droit d’invoquer l’exception à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi quand il s’est retiré à huis clos le 26 avril 2016.

65 La décision au sujet du compte irrécouvrable a été prise par le Conseil en séance publique le 31 mai 2016, conformément à la Loi de 2001 sur les municipalités. Par conséquent, le Conseil de la Ville du Grand Sudbury n’a pas enfreint les dispositions des réunions publiques énoncées dans la Loi durant ses discussions à huis clos du rapport d’ISN, pas plus que durant son vote le 31 mai 2016.

 

Rapport

66 Le Conseil de la Ville du Grand Sudbury a eu l’occasion d’examiner une version préliminaire de ce rapport et de la commenter. Nous avons reçu des commentaires de deux membres du personnel, dont nous avons tenu compte pour préparer ce rapport final. Le Conseil a décidé de ne pas faire de commentaires.

67 J'ai demandé que mon rapport final soit communiqué au Conseil et au public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion du Conseil.


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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario


 

[1] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletAudit Committee Report, Audit of Greater Sudbury Transit Services, (5 octobre 2011) en ligne.
[2] Investigative Solutions Network Inc., Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletCity of Greater Sudbury – Transit Kiosk Contract Report, en ligne.
[3] La provision pour créances douteuses est une provision de Ville en prévision d’une dette classée irrécouvrable, en tout ou en partie, pouvant prendre effet durant l’exercice financier.
[4] Ombudsman de l’Ontario, Enquête visant à déterminer si les Conseils du Canton d’Armour et du Village de Burk’s Falls ont tenu des réunions à huis clos illégales le 16 janvier 2015 (octobre 2015), en ligne.
[5] Ombudsman de l’Ontario, Enquête visant à déterminer si le Comité des priorités stratégiques et des politiques de la Ville de London a tenu une réunion illégale le 2 mars 2015 (12 juin 2015), en ligne.
[6] Solosky c. La Reine, [1980] 1 RCS 821, p. 837.
[7] [2007] O.J. No. 919, à la page 151
[8] Ombudsman de l’Ontario, Conflit ouvert (7 juillet 2010), en ligne.
[9] Ombudsman de l’Ontario, Guide des réunions ouvertes au public, Loi sur la transparence, en ligne.